Hichem Mechichi: Le salut des corps sécuritaires et de l'Administratin régionale passe par leur indépendance (Vidéo)
De l’autorité surtout, ou plutôt une gestion innovante qui garde sous haute vigilance la sécurité intérieure du pays, maintient la mobilisation des équipes, favorise la participation à la prise de décision et la responsabilisation…C’est sur ce pari que mise Hichem Mechichi depuis son arrivée, il y a juste trois mois, d’une rare intensité, sur le fil du rasoir, à la tête du ministère de l’Intérieur. En recevant les clés de cette citadelle qui s’impose avec toutes ses représentations pour les Tunisiens à l’avenue Bourguiba, il entend amorcer une transformation soft et discrète, dans la mouvance du post-Covid-19 avec tous ses chambardements. Il y a débarqué directement de Carthage, où il était conseiller principal auprès du président de la République, chargé des affaires juridiques, après avoir été chef de cabinet aux Transports, aux Affaires sociales et à la Santé, rompu à la gestion des crises…habituelles. Mais cette fois-ci, pour affronter en première ligne à la tête des forces de sécurité intérieure et de l’administration régionale (du gouverneur à l’omda), à la fois le terrorisme, le couvre-feu (à présent levé), le confinement général (puis ciblé, et finalement levé), le rapatriement des Tunisiens surpris à l’étranger et la situation sur les frontières avec la Libye…
Saura-t-il réussir pleinement comme il l’entend avec détermination ? Comment s’y prend-il ? Pendant plus d’une heure, le ministre Mechichi, sans qu’il ne soit interrompu par le moindre coup de fil, a répondu en exclusivité aux questions de Leaders, n’en éludant aucune, sans langue de bois, ni pensée figée, ni voix autoritaire.
Ses convictions sont faites. «Le salut des corps sécuritaires passe par leur indépendance. Ils doivent être maintenus loin de tous les tiraillements politiques et j’y veillerai avec force et détermination», affirme-t-il. Le ministre Mechichi entend «mettre en place des critères précis pour les propositions de nomination des cadres dans les emplois fonctionnels, à partir d’un scoring équitable de leurs performances et d’un monitoring de leurs actes». « La réforme du statut particulier des forces de l’ordre est d’une urgence primordiale pour le ministre de l’Intérieur, tout comme l’adoption de la loi de protection des forces de l’ordre.
Sur la même lancée, «il en va de même pour les cadres de l’administration régionale», déclare-t-il. «Nous sommes déterminés à rompre définitivement d’avec les pratiques d’un autre âge où un cadre régional se trouve nommé à un poste pour de multiples raisons, sauf celles pour lesquelles il doit être réellement désigné, c’est-à-dire sa compétence et sa capacité à donner le plus attendu à la région où il exerce.» «On ne veut plus avoir de cadres régionaux qui ne savent pas ce qui est attendu d’eux, pourquoi ils sont là et, le cas échéant, pourquoi ils ont été remerciés. En parallèle, nous planchons sur un nouveau statut particulier des cadres régionaux qui mettra en valeur leur métier et encouragera leur promotion dans leur carrière», ajoutera-t-il.
Sa démarche est «d’aller vers une sorte de contractualisation avec les responsables de l’administration régionale, c’est-à-dire une définition des missions dont ils ont la charge, et la mise en place d’un système d’évaluation de l’accomplissement de leurs tâches.» Et enfin, un statut particulier pour les cadres et agents de l’administration régionale, un projet du reste bien avancé.
L’image qui l’a le plus marqué, c’est le regard des enfants du martyr Taoufik Missaoui, lâchement assassiné lors de la récente attaque au Lac II. Elle donne un sens à sa mission: sécuriser, rassurer et paver un avenir meilleur pour tous les Tunisiens. La traque des terroristes s’intensifie, et la lutte contre le banditisme et la criminalité (violence, drogue, etc.) ne relâche pas, même si les statistiques sont à la baisse. La recrudescence de l’implication des mineurs l’inquiète. Et le faible nombre de dénonciations d’actes de violence contre les femmes et les enfants l’intrigue quant aux abus tus.
«La numérisation du ministère de l’Intérieur s’impose en priorité, souligne Hichem Mechichi. Notre ministère n’a pas encore fait sa révolution numérique, malgré son grand potentiel et la grande qualité de ses cadres et agents.»
«Le ministère de l’Intérieur est avant tout et surtout le gardien et le garant de la démocratie, affirme-t-il. Il ne peut y avoir de développement dans le pays, sur tous les plans, sans ce département à la faveur de tous ses aspects de sécurité intérieure et d’administration régionale.
Dans la même lignée de son style mobilisateur et participatif, il arrive souvent que le ministre «rende visite, même en solo, aux équipes sur le terrain. Me tenir très près des agents est important, tant pour les galvaniser et les encourager que pour me rendre compte aussi des conditions d’exercice effectif de leur mission.»
Ce qui a changé depuis sa nomination à la tête de l’Intérieur? «Pas grand-chose, nous confie-t-il, sauf que la famille (professionnelle) s’est élargie ! Pour mon plus grand honneur, mon plus grand bonheur»
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