L’inquiétude légitime du Président Mohamed Ennaceur
Muré dans son silence respectueux des institutions, depuis qu’il a transmis, le 23 octobre dernier, les pouvoirs de président de la République par intérim au président élu Kaïs Saïed, Mohamed Ennaceur décline avec sa courtoisie naturelle toutes les sollicitations des médias. Cette obligation de réserve à laquelle il se soumet volontairement ne l’empêche pas cependant de suivre en observateur avisé l’évolution de la situation dans le pays. A ses proches, le Président Ennaceur ne cache pas son inquiétude. Homme du social, il sait d’expérience combien les tiraillements politiques au plus haut niveau, conjugués à la dégradation de l’économie et des finances publiques, se répercute inéluctablement sur la recrudescence du chômage, l’érosion du pouvoir d’achat et l’aggravation de la précarité.
Pour Mohamed Ennaceur, l’approfondissement des clivages entre les décisionnaires politiques et les partenaires sociaux, et les antagonismes ne favorisent guère l’apaisement des tensions déjà attisées par la crise du coronavirus, ni la consolidation des fragilités à divers niveaux. Seule l’instauration d’un dialogue politique constructif, dont les conclusions seront adossées à un plan d’urgence économique et social, est capable de mettre fin à un blocage qui risque de pénaliser lourdement la Tunisie. Entente et cohésion au sommet de l’Etat, accélération de l’examen des projets de loi en souffrance au Parlement et déploiement des réformes, finalisation de la mise en place des institutions constitutionnelles, déblocage de crédits appropriés en faveur des entreprises et vaste programme de secours au profit des populations défavorisées s’érigent, selon lui, en grande priorité.
Les inquiétudes du Président Ennaceur sont encore plus avivées par le contexte régional, avec la détérioration dramatique de la situation en Libye et son cortège de malheurs sociaux, mais aussi la reconfiguration annoncée des relations internationales et l’étiolement de l’aide publique internationale ainsi que de la coopération multilatérale. Que faire ? Mohamed Ennaceur y réfléchit sérieusement mais n’a pas encore révélé la forme et les moyens d’exprimer ses recommandations.