Slaheddine Sellami - COVID-19: Les mesures à prendre pour sauver des vies
Lorsqu’on est en face d’une nouvelle maladie nous devons:
• Tenir compte de l’expérience des pays qui ont été confrontés à cette maladie avant nous
• Adapter une stratégie en fonction de nos moyens matériels et humains
• Etre prêt à changer de stratégie en fonction des nouvelles données de la littérature.
La lutte contre la propagation du virus COVID-19 s’inscrit dans cette situation.
Les différentes stratégies adoptées par les différents pays sont connues et ont été analysées par différents experts.
J’estime que malgré les efforts du ministère de la santé et la pression de la société civile et des scientifiques, les mesures prises souffrent souvent d’une part d’un certain retard d’autre part de fermeté; Par ailleurs sur certains points il est nécessaire de laisser aux scientifiques la liberté totale et qu’ils soient indépendants des politiques. Les pays développés ont fini par se résoudre à suivre les recommandations de leurs conseils scientifiques.
Ainsi, maintenant que la décision de confinement général est adoptée, on peut résumer les mesures complémentaires à prendre aujourd’hui avant qu’il ne soit trop tard :
1- Les frontières doivent être fermées d’une manière hermétique et aucun avion ne sera autorisé à atterrir avec des personnes à bord
2- Appliquer le confinement général avec la plus grande rigueur. Sortir doit être l’exception et sa justification établie.
3- Toute personne arrivée en Tunisie durant les 3 ou 4 derniers jours doit être testée et invitée à un confinement surveillé dans des lieux dédiés. Aucun passe-droit ne doit être accepté
4- Réaliser le maximum de tests possible dans l’entourage des patients, parmi ceux qui sont rentrés mais aussi dans les gouvernorats où il y a eu le plus de cas confirmés. Il est urgent et nécessaire d’autoriser les centres publiques qui disposent du matériel nécessaire pour réaliser une PCR quantitative dans de bonnes conditions de réaliser ces tests avec un maximum de sécurité pour le personnel. Cette mesure permettra de retarder et de diminuer le nombre de clusters. L’apparition de ces clusters est un virage dans la dissémination du virus.
5- Continuer à sensibiliser la population sur les mesures d’hygiène mais aussi sur la nécessité d’appliquer le confinement total ; les sorties doivent être l’exception.
6- Dédier dans un premier temps des hôpitaux et des services de réanimation pour prendre en charge les premiers patients et de fournir au personnel médical et paramédical tous les moyens nécessaires de protection (masques, gants, sur blouses, tenues, lunettes ….). Ce personnel risque de payer très fort l’incapacité des politiques à anticiper l’épidémie.
7- Utiliser toutes nos capacités et toute notre diplomatie afin de trouver sur le marché international les équipements nécessaires pour augmenter notre capacité en lits de réanimation ainsi que le consommable nécessaire pour la protection des équipes soignantes.
8- Assurer le transport domicile / Lieu de travail / domicile dans des conditions sécurisées ainsi qu’un hébergement dans des hôtels à proximité des établissements hospitaliers si nécessaire.
9- Mettre en place en urgence un conseil scientifique composé de nos plus grands épidémiologistes, virologues, réanimateurs, infectiologues, spécialistes dans les politiques de santé publique et ce en dehors de la cellule de crise. Ce conseil aura la charge de constituer une cellule de veille scientifique, d’analyser tous les articles qui paraissent, de conseiller les pouvoirs publics et d’anticiper les complications mais aussi la sortie de crise (traitements, vaccins ….)
10- Pour la prise en charge des patients, il semble que la chloroquine et l’hydrochloquine sont efficaces contre le virus d’après les dernières études en particulier à Marseille. Il faudrait que le ministère encourage et couvre les médecins qui l’utilisent chez nous car ce médicament est très bien connu et pour une utilisation de courte durée il entraîne exceptionnellement des effets secondaires qui sont presque toujours réversibles. Il ne faut pas attendre les grands essais cliniques. La communauté scientifique a parfois des réactions peu orthodoxes car ne tient pas compte de l’urgence.
En fonction de notre stock, il faudra le réserver avant tout aux malades graves et hospitalisés puis aux malades à risque de développer des formes graves. Il faudrait aussi encourager sa fabrication locale si nécessaire et aider ces fabricants à acquérir la matière première. Le conseil scientifique déterminera les conditions d’utilisation du produit qui peut être associé à un anti viral et/ou à la L’azithromycine et ce afin de permettre une utilisation en dehors de l’AMM. Attention à l’auto médication .
Si toutes ces mesures sont prises et surtout appliquées avec la plus grande rigueur nous pourrons très probablement limiter les dégâts et sauver le maximum de vie.
Le coût ne doit pas être un facteur limitatif car celui du traitement des formes graves sera beaucoup plus élevé.
Slaheddine Sellami