Mohamed Kasdallah: Vaincre le terrorisme sans l’éradiquer ? Vraie question et fausse indignation
Le terrorisme qui frappe la Tunisie fait partie d’une stratégie plus globale de déstabilisation d’un espace géopolitique qui s’étend du Machrek au Maghreb y compris dans sa partie Sud qui comprend la région englobant les pays du Sahel.
L’objectif de créer le chaos en Tunisie ne fait plus l’ombre d’un doute. Il ne fait que compliquer le règlement de la crise libyenne et du coup, il permettrait au terrorisme de «couvrir» toute la frontière Est de l’Algérie.
La mort d’un Officier de la police? Préhistoire, c’est déjà oubliée! La mémoire tunisienne ! Ah, l’amnésie nationale! Ça va être oublié dans 24h chrono! On se souviendra à peine des corps humains déchiquetés et éparpillés à des centaines de mètres dans des endroits traumatisés par une exhibition barbare. Et il est probable que le pays continuera longtemps à s’horrifier de cette escalade d’abjection avant de se résoudre à se donner les moyens d’y mettre fin.
Il n’est pas certain que le terrorisme puisse, un jour, être vaincu par des stratégies de «containment»: Il a le choix des armes, le choix du moment et le choix de ses cibles. Il frappe là où il peut .Quand il ne peut pas, il frappera là où il veut.
Le terrorisme sera vaincu le jour où l’idéologie qui le fonde, le légitime et l’anime sera vaincue. Le jour où le salafisme qui suggère et justifie le crime n’aura plus droit de cité.
On ne se protège pas du terrorisme; s’il ne vous atteint pas, il atteindra votre prochain. Pour s’en protéger, il faudrait l’éradiquer, le démanteler par la racine.
Les débats sous la coupole de l’ARP traduisent un chaos indescriptible. La haine échangée entre «députés», les guillemets s’imposent, ne fait qu’attiser un feu déjà ravageur.
Dans notre langage courant, il nous arrive d’évoquer les terroristes par le vocable insultant pour la fraternité de «Ikhouèn». Si l’Islamisme et son corollaire, le terrorisme ont si longuement perduré dans notre pays, c’est qu’il y a un fondement sociétal au phénomène Quand on n’a pas le courage de s’interroger individuellement et collectivement sur les responsabilités, il ne sert à rien d’aller se chercher de superflues indignations. La Tunisie l’a appris à ses dépens: On ne manipule pas impunément l’Islamisme car il finit par nous exploser à la figure et quand on s’y empêtre, on n’en sort jamais sans dégâts.
Ces députés qui persistent dans leur agitation névrotique, s’accusent à cor et à cri d’apostasie ou d’excommunication, sont des vrais théoriciens du terrorisme et sont aussi dangereux que les tangos des djebels.
Irréductiblement hostiles les uns des autres, ils ne constituent que la partie visible de l’iceberg. Celle-ci donne déjà le vertige et le bon sens commun nous pousse à des questionnements incontournables: Comment tout cela at-il été possible pendant tout ce temps? N’y avait-il point d’hommes dans cet Etat en mesure d’alerter sur l’ampleur des dégâts et de mettre un terme à cette gabegie ? Certains parmi ceux qui dirigent encore aujourd’hui étaient nécessairement impliqués, alors comment peuvent –ils encore disposer de droit de gouverner et de décider de l’avenir d’un pays qu’ils avaient laissé meurtrir?
Qu’est-ce qui dans la société civile n’avait pas fonctionné et pourquoi? Comment a-t-on pu accepter l’abandon de tant de projets de réformes stratégiques pour la Tunisie, lui faisant perdre une décennie pour le seul profit d’intérêts étroits d’une caste incapable d’avoir une vision nationale des enjeux?
Cette caste est non seulement coupable d’avoir pillé le pays mais aussi et surtout de l’avoir empêché d’émerger et d’être ce à quoi naturellement l’Histoire le prédestinait.
Notre belle Tunisie est très chère, il ne faut pas la laisser entre les mains des sans principes, sans morale et sans conscience; «Ils déciment le troupeau avec le loup puis ils pleurent avec le berger» selon le proverbe du terroir.
Enfin, cette situation ne disparaitra pas avec ses hommes les plus visibles, mais par une refondation de l’Etat et de ses institutions, une réforme profonde de la société. L’offre politique aussi doit changer, de nouvelles élites doivent émerger et aux «intellectuels organiques» de s’imposer .Ces derniers ne tomberont surement pas du ciel, mais seront l’émanation d’une volonté populaire, d’une nation organiquement constituée et d’une société civile faite de liberté.
Mohamed Kasdallah
Officier(r) de l’Armée Nationale
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A bon entendeur salut! Bravo Si Mohamed!