Olfa Terras : le basculement en politique s’est avéré un chemin rugueux semé d’embûches...
Comment trouvez-vous l’ARP?
L’accueil que j’ai reçu à l’ARP a été plutôt cordial et bon enfant, dans un esprit ‘’rentrée des classes’’. C’était un changement bienvenu, après une campagne marquée par des attaques particulièrement violentes et personnelles à mon encontre. J’y ai vite pris mes marques, avec aussi notamment la bienveillance des employés de l’ARP, étonnamment soucieux de mon bien-être.
J’ai vite pris mes marques et intégré les deux commissions qui m’intéressaient le plus:
- La commission des Tunisiens à l’étranger, convaincue que je suis que nous ne donnons pas assez d’importance à notre diaspora qui regorge de talents et qui pourrait contribuer utilement à changer la donne en Tunisie.
- La commission des droits, libertés publiques et relations internationales, car il n’y a pas de développement possible sans un Etat de droit et sans attirer les investisseurs étrangers, notamment dans les secteurs à haute valeur ajoutée.
Seule élue des listes de 3ich Tounsi, vous avez rejoint le bloc de la Réforme nationale conduit par Hsouna Nasfi. Pourquoi ce choix?
J’ai été invitée à rejoindre le bloc de la Réforme nationale. Au sein de ce groupe, nous partageons bon nombre de valeurs, même si nous ne sommes pas d’accord sur tout, ce qui est normal. Le but est d’être plus forts ensemble que la pure somme arithmétique des députés qui constituent le bloc. Nous organisons très régulièrement des groupes de travail et le groupe a pu obtenir des positions importantes dans les diverses commissions parlementaires, en plus du poste de 2e vice-président de l’ARP.
Quelles sont d’après vous les préoccupations majeures qui méritent de votre part une proposition de loi à présenter, avec votre bloc, à l’ARP?
J’entends concentrer une grande partie de mon mandat sur la réalisation de projets concrets dans ma circonscription de Bizerte. Il y a tant à faire dans cette région qui a été délaissée par le pouvoir central depuis des décennies, dans les domaines de l’environnement, l’économie sociale et solidaire et la santé. C’est sur ces réalisations que je veux être jugée à la fin de mon mandat.
Bien entendu, j’ai vocation à m’exprimer et à m’engager sur des questions d’ordre national. Je n’ai d’ailleurs jamais hésité à me rendre dans d’autres régions de la Tunisie comme ce fut le cas avec la création du centre culturel et des arts de la montagne à Jbel Semmama.
Pour vous, la page 3ich Tounsi est définitivement tournée?
3ich Tounsi est une association qui a été fondée sur cette statistique effrayante que la priorité numéro 1 des jeunes de 18 à 30 ans est de quitter la Tunisie. A partir de là, un vaste dialogue jamais entrepris auparavant a été mené avec la population, et cela a culminé avec la grande consultation auprès de plus de 400.000 personnes, un échantillon sciemment très important. En a émergé une feuille de route, qui a été signée par pas moins de 1 million de Tunisiens, et que l’on a pris pour un mandat de représentation, mais le basculement en politique s’est avéré un chemin rugueux semé d’embûches...
Une approche différente de la voie « antisystème » a été couronnée par le succès électoral, avec l’élection de Kaïs Saïed à Carthage. Mais, pour 3ich Tounsi, répondre aux exigences attendues d’un nouvel entrant dans l’arène politique a été compliqué, à cause de facteurs exogènes, comme l’obsession pour le scrutin présidentiel plutôt que législatif, mais aussi à cause d’erreurs commises en interne…
La page 3ich Tounsi est tournée, et de nombreuses leçons ont été apprises. Une équipe politique aguerrie sur le terrain, un programme, mais aussi une gouvernance claire à la tête de l’organisation, sont des éléments nécessaires à obtenir une représentation conséquente à l’ARP.
Est-ce que vous réfléchissez à un format de rassemblement et d’action avec ceux qui ont rallié votre programme?
Je n’y pense pas du tout en ce moment. Je me concentre sur mon mandat de député, j’ai une responsabilité envers mes électeurs et je travaillerai en mon âme et conscience pour le bien du pays comme je l’ai toujours fait.
Où en est votre fondation?
La fondation n’a jamais cessé ses activités. Nous continuons à soutenir les artistes avec entre autres le prix pour l’art et la culture qui est à sa troisième édition cette a année, à donner des bourses d’études dans des domaines aussi variés que les sciences politiques, la nanotechnologie, la médecine et la musique. L’année dernière, nous avons beaucoup travaillé sur l’artisanat et nous avons produit une cartographie raisonnée de l’artisanat tunisien en collaboration avec l’Onat, c’est un travail gigantesque qui vise à mettre en place une carte nationale numérique interactive répertoriant les différents métiers et secteurs de l’artisanat de chaque village et région de Tunisie. L’objectif est de promouvoir la richesse artisanale tunisienne en permettant notamment de préserver les archives nationales et de sauvegarder le patrimoine. C’est ce genre de projets structurants et innovants qui changent les choses en profondeur et pour les générations futures que j’essaye de mettre en place en Tunisie.
Quel a été pour vous le moment le plus heureux de votre vie privée?
Sans doute la naissance de mes enfants. C’est un moment magique.
Quel grand moment de bonheur et d’accomplissement attendez-vous désormais le plus?
Je n’attends rien. J’essaye juste d’être utile et de ne pas perdre ma bienveillance.
Maman de cinq enfants, députée, présidente d’une fondation dynamique, vivant entre la Tunisie et l’Europe, comment vous organisez-vous pour mener cette vie très intense?
Je fais comme toutes les mamans du monde, je travaille dur et je ne me plains jamais..
Propos recueillis par Fatma Hentati
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