Abdelhamid Larguèche : Cette assemblée qui nous fait si peur!!!
La nouvelle Assemblée des représentants du peuple issue du scrutin du 6 octobre 2019 fait peur, non seulement par son émiettement mais surtout par le virage à droite qu’elle dessine pour le pays durant les cinq prochaines années.
Elle fait peur parce que les représentants des tendances les plus radicales et les plus aventurières du «salafisme jihadiste» y sont « dignement » représentés et annoncent ouvertement leur contre-projet de société comme un programme à l’ordre du jour.
Elle fait peur parce que les tendances du modernisme progressiste toutes confondues y sont faiblement représentées et la gauche au sens historique du mot complètement effacée.
Elle fait peur aux femmes tunisiennes parce que elles y sont sous représentées à un moment où leur participation à la vie publique et leur combat pour les droits et l’égalité ont sensiblement avancé sur un terrain pourtant plus que mouvant.
Elle fait peur parce que cette mosaïque faite de tout et de rien donne un net avantage au parti «Ennahdha» pour mener la danse et pour faire et défaire les coalitions et les gouvernements selon sa propre stratégie et ses intérêts partisans.
Il est peut-être inutile de faire de l’autocritique à la place des autres, notamment ceux qui se terrent aujourd’hui dans un silence de morts, mais l’histoire ne pardonne jamais aux coupables. Non seulement ils ont été sanctionnés par les urnes, mais ils seront rattrapés par leur mauvaise conscience dans cette descente collective aux enfers.
Derrière l’effondrement de Nidaa, du Machrou, de Tahya Tounes , et autres, derrière la défaite humiliante des faux leaders issus tous de cette famille politique hybride, c’est la fin de toute cette classe d’apprentis politiques qui s’est improvisée classe dirigeante à l’ombre du vieux président au crépuscule de sa vie.
Aucun véritable parti moderne n’a pu voir le jour à cause de cette maladie incurable faite d’égos démesurés et d’opportunismes. Pourtant que d’efforts investis et que d’énergies dépensées pour doter le premier parti des élections de 2014 d’une véritable vision d’avenir, d’une plateforme politique et de structures viables.
Rien de tout cela n’a résisté à la tempête de la colère et du désespoir. Tout ce qui aurait pu constituer un front pour la défense de la démocratie et du progrès a lâché d’un coup.
Ce n’est peut-être pas de cette vieille classe politique que viendra le salut. Ne faudrait-il pas chercher les ressources du renouveau politique au cœur de la société civile même ?
Cette jeunesse pleine de vitalité et d’énergie qui s’active dans la société civile dispose de l’intelligence, de la compétence et de suffisamment de ressources pour investir le champ politique, pour renouveler la classe politique et les manières de faire, d’agir et de s’organiser.
La refondation du politique passe nécessairement par les nouveaux acteurs issus de la société civile.
Heureusement que la loi scélérate sur l’exclusion politique n’est passée. La porte est ouverte pour une dynamique nouvelle et un espoir nouveau.
Abdelhamid Larguèche