Malek Ben Salah: Agriculteurs, Agronomes…, mes amis ! La main dans la main, sachons qui élire !
Agriculteurs, Agronomes nous sommes du même bord même si certains n’en sont pas convaincus ! Nous sommes à la veille d’élections présidentielles et d’autres parlementaires qui suivraient ! Et, ma foi, choisir les bons élus qui vont porter l’étendard de notre Agriculture du futur, n’est ni facile ni évident pour tous ! Mais faut-il encore que nous soyons bien conscients de notre poids dans la balance des élections ! Au nombre de 516.000 exploitants agricoles, lors du recensement de 2004-2005, vous seriez 600.000 aujourd’hui auxquels s’ajouteraient quelques milliers d’agronomes formés dans (et hors du pays), soit, et à raison de 3 à 4 adultes par famille, nous serions facilement donc quelque deux millions d’électeurs ; soit un poids respectable dans des élections, si bien sûr, nous savons choisir ; qu’il s’agisse de présidentielles ou de parlementaires.
Bien entendu le choix ne peut se faire que parmi les candidats qui dans leur programme, s’ils ont en un, daignent proposer, non seulement de résoudre les nombreux problèmes, anciens et nouveaux de cette agriculture abandonnée à elle-même ; et surtout à contribution toutes leurs leurs capacités dans un combat le match sans merci et bien préparé contre cet ogre du XXIème siècle que constitue le changement climatique dont l’agriculture est l’une des cibles privilégiées ! Le Tunisien moyen ne saurait qu’applaudir tout effort qui sera insufflé à ce secteur pour améliorer le coût de son couffin quotidien … tout comme chaque agriculteur ? Conscient de l’énormité de cette tâche, j’ai essayé durant l’année écoulée, moi qui ai horreur de tout ce qui est ‘’politique’’, de me rapprocher de 3 partis politiques pour leur proposer de concevoir un programme sérieux pour l’agriculture et de prendre sa défense lors de leur campagne électorale…, mais en vain, l’agriculture est un domaine qu’ils veulent ignorer.
N’est-ce donc pas le moment “لنرُدّ الصاع صاعين” ; c’est-à-dire de distinguer ceux qui voudraient bien considérer ce secteur comme l’une des rampes de relance de l’économie du pays et prendre les devants pour lutter contre le changement climatique, qui s’installe déjà et dégager les nombreuses urgences ‘’ !
Ce sont donc, des attaquants que nous devons sélectionner (pardon d’élire) pour ce match dur à mener contre le changement climatique !
Tout comme les attaquants dans un match de football, dont la tâche est de concrétiser un jeu offensif... ; nos élus potentiels, visant bien les points sensibles du changement climatique, devront connaître les objectifs nationaux et les ambitions régionales et analyser de mieux en mieux cet ennemi climatique pour se comporter comme des attaquants de pointe qui ont, en même temps un sens poussé de l’organisation de leurs interventions, pour profiter des conjonctures particulières et se créer des espaces suffisants pour défendre ou réadapter une innovation ou éviter un faux pas, effectué par le passé, et faire l’impossible pour les transformer en occasions de placer un projet performant en fonction des motivations et enjeux préalablement déterminés. En foi de quoi ils pourront décider en commun des ‘’quand, quoi et comment…’’ à utiliser pour défendre possibles de notre secteur, ou au contraire, à l’en faire profiter !
La lutte contre le changement climatique implique aussi bien une réorientation étudiée des objectifs des différentes agricultures, que la détermination des rééquilibrages à apporter aux systèmes de production en pluvial et ceux en irrigué, la définition d’une nouvelle politique de l’eau, une réduction progressive des problèmes relatifs au nombre des exploitants, de leurs tailles, de leurs âges, de leur surendettement, de la rentabilité des systèmes de production qu’ils choisiraient, du financement de leurs activités, de l’organisation de leur profession, des moyens humains et matériels à intégrer dans l’activité de l’Administration ou de l’en débarrasser, etc…, etc…, etc…. Ce qui nécessite la préparation de programmes qui ne nous éclaire pas sur l’avenir qu’ils conçoivent pour le secteur et par conséquent pour le pays ne mériterait pas votre voix à mon humble avis! Pour ce qui me concerne, en tant qu’expert que 21 années de retraite n’ont pas pu éloigner de notre merveilleux secteur ; je ne ferai que rappeler, en vrac, ce en que tout candidat aura à vous présenter, mon cher Electeur et comment il compte les attaquer ; si bien entendu il veut sortir d’un continuum avec ses prédécesseurs qui n’ont fait subir au pays qu’échec sur échecs…. !
Quels programmes exiger donc de nos attaquants ?
Le programme d’attaque, devant partir de l’impact du changement climatique, se doit de mettre au point une vision claire tenant compte des erreurs du passé et proposer une réorientation des enjeux et, en particulier une focalisation sur les réformes à engager en vue : (1) d’atténuer les effets du changement et d’adapter l’occupation du sol (2) d'accroître la productivité des systèmes de production au moindre coût pour assurer un développement de la production agricole avec une création optimale d’emplois et une utilisation efficace et économe des facteurs de production ; (3) de conserver et améliorer le patrimoine naturel (sol, eau, plante, bétail, ressources sylvo-pastorales, parcours…) ; (4) d'assurer un niveau de revenu individuel décent vie à la population agricole et rurale; (5) de réduire la dépendance de l’importation des matières premières destinées à l’alimentation humaine et animale et garantir la sécurité de l’approvisionnement (6) d'améliorer le coût du couffin quotidien du Tunisien à des prix raisonnables ; et (7) d’adapter la gouvernance et la structuration institutionnelle dans le domaine agricole (aux niveaux étatique, professionnelle et au niveau des synergies à instaurer entre elles)…
Le changement climatique venant se juxtaposer à une agriculture déjà bourrée de problèmes, les élus potentiels auront donc à présenter l’une après l’autre les actions qu’ils comptent mener face aux divers problèmes (technique, économique, social et environnemental) et dont ci-après quelques éléments :
Programmes et perspectives de la production agricole sous changement climatique
L’agriculture tunisienne soumise depuis longtemps au climat méditerranéen au Nord et sur la côte Est, et, semi-aride à l'intérieur et Saharien au Sud du pays… ; contribue aujourd’hui pour 1/5ème à l’émission de gaz à effet de serre, et subit en contre coup les effets du changement climatique… Il est donc fondamental que le pays puisse disposer d’un programme qui favorise son adaptation à cette nouvelle donne et par quels moyens et par quelles pratiques lui sera assurée une durabilité à même de s’adapter à ce changement et(ou) d’en atténuer les impacts. La production agricole a, de plus, à relever une série de défis propres à chaque région, parmi lesquels l’aridité, la superficie limitée des terres cultivables, la rareté des ressources en eau et les graves conséquences du changement climatique, afin de parvenir à un développement durable.
De la nécessité d’une réorientation des productions végétales et animales
La ressource existante de 10 millions d'ha de terres agricoles est répartie entre 3 grandes zones naturelles qui ont représenté jusqu’ici des conditions compatibles à une certaine diversification de la production agricole : soit une couverture forestière et une dominance des cultures céréalières dans le Nord, une prédominance de plantations arboricoles (oliviers notamment) au Sahel, à Sfax et au centre), des palmeraies et des parcours dans le Sud… ne semblant plus répondre aux besoins de futurs objectifs ; quelles vocations régionales et quelle répartition devra-t-on cibler ?
Les céréales, si nécessaires comme matières premières destinées à l’alimentation humaine et animale, développés jusqu’ici en tant que produits de consommation et de transformation, ont pu occuper nos sols grâce à leurs caractéristiques d’espèces méditerranéennes et à une recherche qui sélectionnait leur résistance à la sécheresse qui caractérise une partie du pays moyennant des rendements plutôt moyens mais une dégradation de la fertilité des sols, plus ou moins liée à des pratiques inadaptées ; des importations devenant de plus en plus conséquentes ! Sous les perturbations qu’apporte le changement climatique, des mesures d’adaptation et d’atténuation deviennent encore plus indispensables pour les céréales et pour tout le cortège de systèmes de productions végétales et animales à développer. Des travaux de recherche et d’introductions variétales (et de races animales) importants deviennent nécessaires dans les programmes futurs ; et un rééquilibrage devant définir les techniques éventuelles de sélection et l’utilisation des capacités symbiotiques de mycorhizes ou de rhizobiums… à adopter pour améliorer leur productivité et leur rentabilité…et pour parvenir à une limitation des importations de matières premières céréalières insuffisantes (tel le maïs ou le soja) qui ne doit plus perdurer et quelles mesures à préconiser pour trouver des systèmes de production adaptés à ces changements climatiques ?
Pour les protéagineux, oléagineux, oléo-protéagineux et leurs coproduits, les programmes devront comporter un chapitre sur leur production (notamment pour les légumineuses et l’olivier) et les bonnes pratiques à introduire pour leur adaptation et les objectifs de productivité à leur assigner…. Les importations de soja et la proportion de tourteaux à intégrer dans les concentrés pour animaux à fabriquer, il y a lieu d’indiquer l’approche prévue en mélange avec les protéagineux locaux pour limiter l’importation de cette matière première qui, souvent, est accompagnée de maïs….
En fait, la diversité des potentialités régionales impose à toutes ces productions de relever l’ensemble des défis et des changements climatiques, propres à chaque région (aridité, sensibilité aux inondations, superficie limitée des terres cultivables, rareté des ressources en eau et en sols, programmes de recherche et de vulgarisation insuffisants…) qu’aggravent les conséquences du changement climatique. Une prise d’options adaptées est nécessaire à chacune d’elles pour parvenir au développement durable souhaitable. Les effets sur l’agriculture variant selon les systèmes et écosystèmes.., les programmes de nos ‘’candidats’’ devront être adaptés à ces contextes ; sans oublier qu’il pourrait devenir impossible de pratiquer de l’agriculture dans certaines zones auxquels cas des activités connexes sont à proposer pour la reconversion des exploitants et des terres (conduites en pluvial ou en irrigué) de ces zones.
Quant à l’objectif de sécurité alimentaire, sans cesse évoqué par des politiciens qui n’y connaissent rien, une autre approche pourrait, également, être intégrée dans la politique agricole à proposer. Elle consiste en une mise de l’accent sur un développement rural, là où c’est possible, sur la production de légumes et fruits qui offre un avantage comparatif en frais et (ou) après transformation dans les petites et moyennes exploitations en les encourageant à se grouper. Ces programmes qui viseraient un niveau de sécurité alimentaire par élimination de la pauvreté, et non pas par un auto-approvisionnement en blé plus important… une éducation plus pointue en agronomie et zootechnie et une meilleure connaissance des marchés éventuels d’exportation devra être présentée pour les jeunes générations en conséquence (ex. cas de certaines zones du Sud par le passé). Ces cultures avec les produits d’élevage pourraient accroître les revenus des exploitants, améliorer la nutrition et utiliser l’eau avec plus de parcimonie.
Pour le consommateur et son inlassable quête d’une pitance quotidienne, plutôt minable et si coûteuse, il est crucial que les programmes, pour ceux qui en ont, présentent des cadres d’actions propices à surmonter ces changements climatiques… C’est dire qu’ils aient une vision meilleure d’un système alimentaire ‘’bon marché’’ qui donne priorité à une politique favorable à une agriculture compétitive, durable, productive, résiliente et adaptée à nos exploitations agricoles et entreprises agroalimentaires qui valoriseraient leurs productions, en vue de nourrir une population dont la consommation alimentaire dépend de plus en plus de l’importation ; situation aggravée, bien entendu, par un changement climatique qui limite les capacités de production et augmente les besoins d’approvisionnement à l’étranger. L’objectif de sécurité alimentaire nécessite une réelle politique agricole qui rendra à l’exploitation et à l’exploitant agricole un rôle plus central dont ils n’ont jamais bénéficié !
Aspects particuliers de l’utilisation du patrimoine ‘’sol’’
Il est bien connu que la Tunisie souffre d’un environnement difficile pour l’agriculture ; les terres, irriguées ou conduites en pluvial, souffrent en permanence de la dégradation causée par l’érosion éolienne et hydrique, ainsi que par des pratiques agricoles non durables. Les nombreuses dérives techniques des structures étatiques et celles de l’agriculteur (suite à une insuffisance d’encadrement ou par manque de moyens matériels ou financiers). Déjà en 1945, on savait que la simplification des systèmes de culture et l'absence d'assolement adéquat, dans les régions céréalières, avaient pour effet l'appauvrissement progressif, lent mais sensible, des sols en matière organique et on avait montré que la décomposition de la matière organique du sol est plus rapide que sa formation suite aux passages successifs des charrues pour travailler le sol ; soit une perte de la fertilité de ces sols conduits en pluvial (en plus de la salinisation sur les terres irriguées) entraînant une baisse générale des rendements qu’aggrave le changement climatique.
Les programmes auront à présenter, pour chaque région, ce qu’ils projettent de faire comme rotations céréalières avec de la luzerne, du colza, des fabacées, des fourrages ou des prairies temporaires… considérés, ailleurs, comme de bonnes têtes de rotation dans des systèmes de production, avec ou sans élevage… de plus en plus induits ou exacerbés par le changement climatique, et éviter la destruction de l'humus et des complexes argilo-humiques insolubles du sol…. ;
Aspects particuliers de l’utilisation de la ressource ‘’eau’’
L’agriculture étant le secteur qui utilise le plus d’eau, il reste essentiel d’en améliorer la gestion afin de stopper la dégradation des sols et permettre son adaptation au changement climatique, surtout en proposant des reconversions de l’irrigué au pluvial. Des solutions adéquates sont à mettre au point pour les zones exposées à des sécheresses fréquentes et aux pénuries d’eau, un mixage est à prévoir entre des parcelles irriguées sur les nappes souterraines et des cultures en pluvial au sein de l’exploitation agricole.
Et si, à côté de la dernière version du Water Risk Atlas du 24 Août 2019, le World Resources Institute classe la Tunisie 30ème pays menacé par le stress hydrique parmi les pays confrontés à des niveaux extrêmement élevés de stress hydrique, l’agriculture irriguée et les industries qui consomment en moyenne plus de 80% de l’eau disponible en surface et dans les nappes phréatiques ; dans sa publication ‘’ Opinions’’ du 21 Août 2019 courant, la Banque Mondiale notait de son côté, que : ‘’La crise mondiale de l’eau se résume en 3 enjeux (inondations, sécheresses et pollution de l’eau) ; et que pour répondre à cette crise, le Pôle mondial d’expertise en Eau de la Banque mondiale a lancé un nouveau plan d’action stratégique autour de 3 piliers étroitement liés : 1) préservation des ressources hydriques (par une gestion plus productive et plus durable de ces ressources limitées) ; 2) prestation des services (approvisionnement en eau, assainissement, et optimisation de son utilisation en agriculture : accès des collectivités rurales, amélioration de l’irrigation pour atténuer les effets du changement climatique, promotion d’une utilisation efficace de l’eau et favoriser les activités d’irrigation menées par les producteurs au sein de l’exploitation agricole…) ; 3) renforcement de la résilience pour contribuer à la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD) et renforcer la capacité d’aider le pays (gestion rigoureuse de la ressource eau, atténuation des risques d’inondations et de sécheresses en améliorant l’état des bassins hydrographiques, utilisation de solutions stratégiques plus appropriées…) ; c’est que à ces enjeux, au moins les programmes de nos élus potentiels auront à présenter comment ils verraient la mise à profit de ces recommandations de la Banque pour minimiser ces risques.
Ces avis, du World Resources Institute et de la Banque mondiale, relatifs à la sécurité hydrique devant être accompagnés, pour sa valorisation, de stratégies de sécurité alimentaire adéquate : (1) Les meilleurs sites de barrages ayant été aménagés pour le nord et l’extrême nord l’utilisation de la ressource devra être conçue sous forme de petits aménagements au niveau de l’exploitation de façon à favoriser ‘’des exploitations de polyculture intégrant le pluvial et l’irrigué et de l’élevage’’ valorisant l’eau et le sol pour le maintien de la fertilité des sols et de la durabilité des deux secteurs (eau et agriculture) ; (2) La réhabilitation continue et le maintien en bon état de fonctionnement de l’infrastructure hydraulique existante au profit des générations actuelles et montantes ; (3) L’agriculture pluviale, en tant que mobilisateur très important des ressources pluviales devra bénéficier de plus d’attention en termes d’incitations, de restructuration, de réformes et d’appui scientifique ; (4) Le domaine de la recharge artificielle des nappes, mené jusqu’à présent à titre expérimental alors qu’il est fondamental dans la sécurité hydrique du pays, serait à reprendre dans les régions du Cap Bon, du Sahel, du Centre, de Sfax et du Sud pour mettre à profit les eaux de crues ou d’inondations ;
Enfin, les extensions des périmètres irrigués publics devront être ralentie et objet d’études préalables approfondies pour ne plus menacer les ressources souterraines encore disponibles ; des alternatives sont à proposer !
Quel type d’agriculture adopter, et avec quels programmes ?
En Tunisie, miser sur le développement d’une filière telle que l’agriculture constitue certes une opportunité pour l’économie tunisienne qui n’a jamais été saisie par les pouvoirs publics. Le choix de filières dépassant l’octroi d’incitations financières spécifiques, doit intégrer une mise en place d’un écosystème complet et cohérent incluant toute la chaîne de valeur des systèmes de production considérés.
Ainsi, parmi les nombreux systèmes de production on distingue différents types d’agriculture ; les plus courants en Tunisie on trouve : l'agriculture conventionnelle qui est un système, basé sur la polyculture et l'élevage, extensif ou intensif (avec usage important d'intrants pour maximiser la production) qui tient peu compte de la dégradation du sol et dont l’impact sur l’environnement est souvent négatif. De nos jours, on parle de plus en plus d'agriculture écologique a comme préoccupation primaire de gérer ses effets sur cet environnement grâce à des pratiques agricoles adaptées à ce fait ; «l’agroécologie» étant l’application de l’écologie à l’étude, la conception et la gestion des systèmes agroalimentaires durables. C’est une pratique interdisciplinaire qui implique une redéfinition des frontières scientifiques et sociales, soit un défi majeur pour la recherche agronomique qui demande la construction de nouveaux savoirs et un mode de formation des scientifiques qui travaillent sur les systèmes agricoles et alimentaires plus harmonieuse entre la nature et l'humain replaçant celui-ci face à sa responsabilité à l'égard du Vivant . N’ayant pas encore opté pour cette approche, nos candidats aux élections devant prendre parti contre ou pour aboutir à un équilibre agroécologique harmonieux mêlant : agriculture et écologie, pratiques agricoles, quantité et qualité, activités humaines et biodiversité, philosophie et techniques, écosystèmes et systèmes sociaux souhaité dans plusieurs pays, et formuler leurs propositions en la matière. L’agroécologie et l’écologie devenant un leit motiv fondamental dans toutes les actions menées dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique dans le monde entier !
Des difficultés foncières, taille de l’exploitation agricole, terres domaniales et programmes à présenter
La plus grande difficulté foncière provient de la structuration des exploitations, dominée par les petites tailles avec 75 % qui sont inférieures à 10 Ha et des propriétaires confrontés à de grandes difficultés de ce fait ; avec en face l’existence de plus de 500.000 ha de terres domaniales que l’Etat s’était approprié et ‘’exploité’’ depuis 1964, alors qu’il n’a pas à mener d’activité concurrentielle qui n’ont rien à voir avec ses fonctions régaliennes. Les modes de gestion de ces terres, ne cessant de changer, reste très discutable : l’Etat continuant à louer ces terres à des SMVDA, solution qui a déjà fait faillite depuis l’ancien régime soit un manque de productivité certain ; le climat en devenant plus chaud et plus sec à l’avenir sous l’effet du changement climatique ne fera qu’exaspérer les pertes qui en découlent.
L’absence constatée jusqu’à présent d’un développement agricole, prouvant bien que ce genre d’objectif nécessite un grand effort matériel et technologique, une assistance de la petite exploitation pour accroître ses productions et améliorer sa résilience face au changement climatique et aux chocs météorologiques… Un appui à la sécurisation foncière de ces petits agriculteurs, des producteurs ruraux par la valorisation et la commercialisation de leurs productions agricoles, l’accès au marché et la régulation des échanges. Une gouvernance foncière lucide des enjeux (économiques, politiques, sociaux et environnementaux) est nécessaire. Des solutions sont à mettre au point par un appui à cette sécurisation foncière par l’agrandissement de la petite exploitation à partir de ces 500.000ha de terres domaniales, si mal exploitées par un Etat peu préparé à jouer le rôle d’agriculteur ; là également des propositions sont à faire pour dynamiser le secteur en introduisant l’innovation, les progrès techniques et moderniser l’agriculture tout en l’adaptant au changement climatique.
Quels programmes pour les services d’appuis (recherche et vulgarisation notamment)
Des doléances faites depuis les années 1980 aussi bien par les agriculteurs que par les compétences du pays, que par l’ensemble des acteurs du secteur, il s’est toujours dégagé un fort besoin de renforcement des services d’appuis (recherche et vulgarisation notamment) ; soit une raison fondamentale pour qu’au moins que les programmes de ces élus potentiels présentent leur vision quant à la relance de ces services d’appui ; non seulement pour mettre au point pour nos différentes régions l’approche en matière d’adaptation et d’atténuation du changement climatique, en plus de ce qu’ils pensent pour l’amélioration de l’ensemble de la fourniture de services publics, l’adaptation des services de la recherche agronomique, de la vulgarisation et de la formation … compte tenu de la complexité des exploitations agricoles, de l’absence de moyens dédiés pour un meilleur fonctionnement et les actions de recherche et d’accompagnement.
La nouvelle vision à présenter devra permettre de repenser de fond en comble la démarche dans le cadre de la reformulation d’un programme de mise à niveau des exploitations agricoles dont la structuration actuelle limite l’ensemble des actions envisageables. Et s’inspirer de l’expérience de pays développés en la matière devrait améliorer les relations entre vulgarisation, formation professionnelle et stations de recherche, les relations régionales entre opérateurs, une collaboration entre vulgarisateurs et formateurs professionnels ne serait-elle pas plus bénéfique ?
Un accompagnement par des programmes sociétaux qui misent sur ‘’une saine ruralité à construire‘’
Pour compléter le schéma global, les propositions à présenter devra faire part à une prospective sur les avenirs possibles de cette ancienne notion ‘’du rural‘’ et ‘’de ruralité‘’, et d’identifier les nouvelles questions et partenariats de recherche permettant un débat sur le positionnement scientifique des institutions de recherche par rapport à cet aspect majeur des relations entre la ville et ‘’la campagne‘’. L’espace rural cristallisant certains enjeux liés à l’agriculture, l’alimentation et l’environnement, est un élément clé du positionnement stratégique de ces deux composants de la société. Or la ruralité est entrée dans une phase annoncent d’importantes recompositions sociales du rural qui, en Tunisie, ne se distingue plus de l’urbain (dans les pratiques, les styles de vie…).
Dans l’ancienne conception d’une collectivité, la ‘’société rurale’’ s’opposait à ‘’l’urbaine’’ qui était supposée être un lieu de modernité. Le rural était caractérisé comme le lieu d’activités agricoles et artisanales réalisées par des populations vivant en quasi-autarcie et attachées à un territoire. Avec les moyens nouveaux, liés aux TIC, la société rurale disparait déjà «avec les forces conjuguées d’objectifs d’industrialisation et d’installations urbaines réclamées progressivement par les campagnes dans un système économique et sociopolitique plus ou moins unifié» . La modernisation de l’agriculture permettrait la transformation du rural en un espace non seulement agricole destiné à la production de denrées alimentaires, mais également en un espace viable et vivable incluant des activités agroalimentaires, mécaniques, intellectuelles, commerciales… ! D’où la nécessité d’une prise en compte dans les espaces ruraux dans les politiques agricoles et agroalimentaires au moins par l’introduction d’objectifs d’une petite industrialisation et de mise à niveau sur le plan éducatif, intellectuel, sanitaire…qui ne devrait pas former seulement un espoir de tirer les populations rurales «vers une modernité factice incarnée par plus de confort et moins de fatigue» mais plutôt par une revalorisation ‘’de la Valeur Travail’’, à présenter également dans les programmes électoraux.
Autour des villes, et à travers ces mêmes programmes électoraux, espérons que ceux-ci sauraient faire émerger des mouvements d’alliance entre agriculteurs et urbains (consommateurs) pour de nouveaux modes relationnels autour d’intérêts réciproques : réduction du nombre d’intermédiaires, pratique de ‘’marchés du producteur au consommateur’’, qualité et traçabilité des produits, débouchés plus assurés, maintien du patrimoine naturel et culturel (sur les questions foncières en particulier)….
En conclusion
A ceux qui se sentent capables d’un pareil changement stratégique propice à la refonte des politiques agricoles pour lutter contre le changement climatique en faveur de la sécurité alimentaire…, et d’un secteur en mesure de jouer son rôle dans la société, j’adresse ces messages, il est temps de prendre la responsabilité d’un éveil collectif des consciences par une politique soutenue d’assistance au développement de la capacité des agriculteurs de mieux produire, y compris par un appel à des vulgarisateurs bien formés et aguerris aux pratiques de systèmes et écosystèmes minimisant l’impact de ces changements et compatibles avec l’amélioration de la fertilité des sols…. et l’adoption d’une politique de l’eau qui favorise l’utilisation de la recharge artificielle à la place d’aménagements coûteux de barrages et de périmètres irrigués ‘’à la vie courte’’. La coopération avec l’extérieur pouvant être orientée vers ces créneaux, la négociation de l’ALECA dont on doit faire un accord gagnant-gagnant, devra viser une incidence directe et positive sur l’agriculture du pays et ses échanges commerciaux… L’intégration de ces paradigmes étant un facteur d’appréciation primordial des programmes de nos élus pour la mise sur orbite de notre monde rural au diapason du XXIème siècle ; et donc pour le choix du candidat efficace…, pour le choix de l’efficacité et non de partis dont on a bien apprécié l’inefficience !
Chers amis et collègues, j’espère que nous avons compris quels attaquants nous avons besoin d’élire ; examinez bien le cas de ceux qui ont pris la peine de venir vous voir, vous voir transpirer dans vos champs, sous un soleil brûlant ou une pluie battante… et qui ont compris pour quelle lutte acharnée contre ce fameux changement climatique on se prête à les élire !
J’ai essayé de me remémorer quelques aspects négatifs de la situation d’un secteur qui ne cesse de tomber dans l’oubli malgré qu’il soit lié à ces fameuses élections ; …, espérant voir nombreux les commentaires, critiques et suggestions de tous pour nous organiser… ! J’ai soufflé, grâce à Dieu, les bougies de ma 81ème année le 29 de ce mois d’Août, je ne sais pas si je dois considérer avoir rendu à cette agriculture les services pour lesquels j’ai été formé depuis que j’ai mis les pieds en ce même mois d’Août 1957 dans l’Ecole Coloniale d’Agriculture de Tunis (ECAT) que Tahar Ben Ammar venait de rebaptiser Ecole Supérieure d’Agriculture de Tunis (ESAT)… ; pour poursuivre ensuite les études à l’Ecole Nationale Supérieure des Sciences Agronomiques Appliquées (ENSSAA) de Paris.
A mon âge, je pense que je pourrais recommander à nos jeunes agriculteurs, agronomes, chercheurs ou enseignants… dont le long silence n’a que trop duré et devient très critiquable, puissent reprendre le flambeau pour faire parvenir le secteur … à de meilleurs résultats dans le futur. Depuis 2011, les responsables qui ont tenu le gouvernail n’ayant rien fait pour cela. Pour les deux dernières années, Dieu seul a fait que la climatologie a permis les résultats enregistrés et aidé à sauver quelque peu notre balance commerciale…. Mais pour l’avenir, rappelons ce verset coranique :
‘’ [الرعد:11] ‘’ ‘’ إِنَّ اللَّهَ لا يُغَيِّرُ مَا بِقَوْمٍ حَتَّى يُغَيِّرُوا مَا بِأَنْفُسِهِمْ ‘’
Ce qui veut dire que ‘’Dieu ne change rien, en un peuple, Tant qu’ils n’ont rien changé en eux même’’
Malek Ben Salah
Ingénieur général d’agronomie, consultant indépendant,
spécialiste d’agriculture/élevage de l’ENSSAA de Paris