Caïd Essebsi : Cessons les surenchères, trouvons des solutions pour la Tunisie (Album Photos)
« Allons main dans la main, pour l’intérêt de la Tunisie » a conclu le président Béji Caïd Essebsi son discours mercredi matin, en commémoration du 63ème anniversaire de l’Indépendance. Tout en revendiquant fermement ses pleines attributions constitutionnelles en tant que chef de l’Etat directement élu au suffrage universel et dans le bicéphalisme de l’exécutif, il a tendu les bras ouverts « à tous », y compris le chef du gouvernement, Youssef Chahed, nommément cité. Sans se priver d’enfoncer des clous dans le camp du chef du gouvernement et d’Ennahda, et par ricochet, le Parlement.
En 55 minutes dans un discours « improvisé » mais visiblement mûrement préparé, prononcé devant plus de 400 invités, toute ouïe, dans la grande salle du palais de Carthage, Caïd Essebsi a bâti sa plaidoirie en séquences successives comme il sait le charpenter. L’axe central est l’unité nationale qui a toujours sauvé la Tunisie dans les pires épreuves. Une unité dont il déplore les tentatives de torpillage par le parti Ennahdha qui, s’emploie, selon le locataire de Carthage à rallier dans son sillage Youssef Chahed, quitte à violer la Constitution. La porte est entrouverte à Chahed, mais Ennahdha est tenue à distance.
Les petites phrases ciselées
« Nous sommes dans une impasse et devons tous nous en sortir, clamera Caïd Essebsi. Profusion d’hommes politiques, pénuries d’hommes d’Etat. Retour impératif à la raison. Pas de démocratie, sans Etat de droit et sans une presse indépendante et responsable qui accomplit son devoir de vérification, sans verser dans la calomnie et la propagation de fausses nouvelles. La continuité de l’Etat, c’est celle des politiques et non des personnes. Nous devons mettre fin au nomadisme parlementaire. Nombre de dispositions de la Constitution sont à réviser. Je n’y procèderai pas au cours du présent mandat, mais je tiens à la disposition de ceux qui s’y intéresser un projet tout prêt. » Les petites phrases ne manquent pas.
Un Etat civil : le dossier est clos
Béji Caïd Essebsi ne se prive pas d’enfoncer des clous. Les acquis de la révolution, la nouvelle Constitutions sont à préserver commencera-t-il par dire avant de pointer du doigt certaines « fausses interprétations » de la loi suprême. Il mentionne à cet égard, deux dispositions qu’il estime significative. D’abord, l’article 2 stipulant que l’Etat est civil, ce qui exclue toute obédience religieuse. BCE rappelle que le projet de la Constitution de juin 2103, « abandonné », voulait inscrire la Chariaa comme source de la législation, et faire de la femme un « complément » de l’homme. Ce dossier est définitivement clos, affirme-t-il.
Un pouvoir exécutif bicéphale
Le deuxième exemple, est l’article 71 de la Constitution de 2014, énonçant en tant que principe : « Le pouvoir exécutif est exercé par le Président de la République et un Gouvernement présidé par le Chef du Gouvernement. » Sans cet exercice conjoint par les deux têtes de l’exécutif, affirme Béji Caïd Essebsi, il y a violation de la Constitution et en accuse le gouvernement et Ennahdha, avec la complicité de l’ARP qui y a acquiescé. Il se réfère particulièrement à la formation du gouvernement Youssef Chahed 3, en septembre dernier, sans lui en référer et passant directement au Bardo pour solliciter un vote d’investiture.
« L’exécutif devient ainsi monocéphale, et le président de la République ne saurait en être tenu responsable, martèle Caïd Essebsi. A la limite, cela aurait été acceptable, si l’action du gouvernement allait dans la bonne voie et je l’aurais admis, puisque l’essentiel, c’est le résultat, mais ce n’est pas le cas, on en est bien loin ». Le chef de l’Etat dressera alors un réquisitoire du bilan économique du gouvernement Chahed, citant chiffres à l’appui, « la dégradation des indicateurs économiques, fort « alarmants ».
... Et tout devient possible!
Mais, c’est vers une sortie de crise, impérative, que semble s’acheminer Béji Caïd Essebsi. Dans une allusion à peine voilée à Youssef Chahed, et se référant à une situation du temps de Bourguiba, il dira : "l me comprend et je le comprends. Tout deux on se comprend". Et de foncer droit au but : ''L’essentiel est de sortir la Tunisie de sa situation actuelle. Si les intentions sont bonnes et allons vers l’action gouvernementale et politique, de bonnes volontés et de bonnes dispositions, tout devient possible.''