Stockholm - Correspondance particulière pour Leaders. La Suède deviendra-t-elle le 7ème pays en Europe, après tout récemment l’Italie, où l’extrême droit mène le jeu politique. En se rendant ce dimanche 9 septembre aux urnes pour choisir les 349 membres du parlement, le Riksdag, les électeurs décideront de la dose de conservatisme de droite et d’extrême droite qui gouvernera le Royaume dès le 25 septembre, pendant quatre ans. Monarchie parlementaire qui a vu depuis plus d’un siècle, les social-démocrates remporter chaque scrutin, la Suède n’est pas à l’abri de voir se confirmer en pole position le courant nationaliste d’extrême droite. Porté par le parti d’extrême droite, les Démocrates de Suède (SD), donné à 20 % d’intentions de vote dans les sondages, ce courant qui agite fortement la question de la migration, rabat toutes les cartes. Avec 450.000 demandeurs d’asile accueillis depuis 2010, et 18.5% de la population, née à l’étranger, l’immigration constitue une préoccupation majeure pour quasiment tous les partis politiques, fortement récupérée par l’extrême droite.
Le chef de file des SD, Jimmie Akesson, 39 ans, en fait le cœur de son programme : «Tout ira bien, il suffit de stopper l’immigration et de renvoyer les immigrés chez eux ». Le même registre qui a porté au pouvoir en Italie en mars dernier, le leader de la Ligue, Matteo Salvini. Mais, la Suède garde toute sa spécificité. Quel que soit le verdict des urnes, il est peu probable que les résultats des législatives impactent les relations entre la Tunisie et la Suède et la coopération engagée.
Eclairage pour mieux comprendre les enjeux de ce scrutin crucial
Les élections suédoises permettent d’élire les corps législatifs aux trois niveaux, à savoir :
- National, le parlement (le Riksdag) compose de 349 membres ;
- Régional, les assemblées des 20 contes ;
- Local, 290 assemblées municipales.
D’aucuns s’attendent que les élections de cette année sont à même de marquer l’histoire politique du Royaume de Suède qui a vu les social-democrates, parti de l’actuel Premier Ministre Stefan Lofven, remporter chaque élection ou presque depuis 1917. En fait, il y’avait pendant de courtes parenthèses un gouvernement de centre-droite durant trois législatures : 1976-1980, puis 1991-1994, et tout récemment 2006-2014, avec la participation des socio-démocrates en opposition, mais toujours comme le plus grand parti, bien au-delà 35%.
Il reste vrai que les socio-démocrates ont toujours été le plus grand parti, jusqu’à nos jours. Selon les sondages les socio-démocrates et les modérés (droite) sont les deux plus grands partis qui perdront le plus dimanche 9 2018 . On verra si les modérés continueront à rester les numéro 2 ou si ils seront battus par les « démocrates suédois» ce qui serait sans précédent les dernières décennies. D’après les derniers sondages, les socio-démocrates récolteraient 24 à 26% des sièges au Parlement.
Cette domination de la gauche a commencé à s’effriter surtout depuis les dernières élections de 2014 avec la montée en puissance des Démocrates Suédois, parti d’extrême droite qui occupe actuellement 42 des 349 sièges du Riksdag et se trouve crédité de 20% des intentions de vote ce dimanche alors que les social-democrates verraient leur score ne pas dépasser les 25%, le pire dans toute leur histoire.
Autant la montée du courant nationaliste d’extrême droite intervient dans le même sillage que d’autres pays européens autant il parait assez étrange de voir la Suède, une monarchie parlementaire traditionnellement paisible, qui se classe parmi les pays qui ont le meilleur niveau de vie en proie à ce phénomène. Le fait est que le pays en est arrivé à vivre un malaise ressenti dans toutes les composantes de la société suédoise et ce compte tenu du nombre croissant d’étrangers qui se sont installés en Suède et qui a atteint les 2 millions, à savoir le 1/5 de la population suédoise de 9,9 millions.
Une ligne plus dure quant à l’immigration
Ainsi, la hausse de la criminalité, la menace terroriste, le chômage rampant affectant les communautés étrangères dont l’intégration est loin d’être acquise, sont autant de phénomènes qui préoccupent le Suédois qui craint aujourd’hui pour son bien-être et remet en question le fait que ces immigrants, peu disposés à s’intégrer en apprenant le suédois et en occupant un emploi, partage avec lui les avantages offerts par l’État providence suédois, à savoir la gratuite de l’éducation et de la sante, notamment.
Il est à relever, dans ce contexte, que tous les partis politiques suédois, qu’ils soient de gauche ou de droite, se sont, relativement, alignés sur les positions de l’extrême droite en optant pour une ligne plus dure quant à l’accueil des immigrants et des demandeurs d’asile.
Pas de changement radical
Toutefois, même si ces élections se présentent comme différentes des autres, le paysage politique suédois ne connaitra pas pour autant un changement radical. En effet, les social-democrates devraient continuer à être le premier parti du pays malgré la régression qu’ils connaissent. Il sera, néanmoins, intéressant de voir quelle configuration aura le nouveau gouvernement issu du scrutin de dimanche. Le fait est que tous les partis en présence, de gauche ou de droite, ont ouvertement annonce qu’ils ne formeraient jamais de coalition avec les Démocrates Suédois quel que soit la place qu’ils occuperont au sein du parlement. Rares sont ceux qui se hasardent à profiler une coalition gouvernementale tant l’issue du scrutin est incertaine en proportions. Certains s’attendent même à un resultat tellement étriqué qu’il ne permettra à aucun parti de former une majorité qui lui permette de gouverner, d’où la possibilité de recourir, à court terme, a des élections anticipées.
En ce qui concerne les relations tuniso-suedoises, il reste très peu probable que l’issue de ces élections ait des répercussions sur la coopération traditionnellement bien ancrée entre les deux pays. Ainsi, l’aide au développement, la coopération en matière de l’égalité des genres, l’innovation…sont autant de créneaux qui ne devraient pas être remis en cause par un probable revirement relatif à droite du gouvernement suédois.
Photo: Melker Dahlstrand