News - 04.09.2018

Dr Basly Mohamed Sahbi: La Tunisie et l’ambitieux projet de «la Route de la soie»

Dr Basly Mohamed Sahbi   La Tunisie et l’ambitieux   projet «la Ceinture et la Route»

Nul ne peut aujourd’hui occulter la place de la Chine sur l’échiquier mondial. La question est de savoir si celle-ci se contentera demain d’être la première économie du monde à l’horizon 2025 ou bien si elle sera tentée de façonner un nouvel ordre mondial ? Ou seulement y contribuer de manière significative ? Telle est la question qu’anticipent les « Global Players « d’aujourd’hui, qui ne finissent pas d’utiliser tous les moyens pour contenir le réveil de ce géant asiatique. Cependant, la Chine populaire contribue ce jour à plus de 25 % du taux de croissance de l’économie mondiale. Il s’agit du premier commerçant de la planète, et les flux commerciaux, maritimes, aériens et terrestres, longtemps en direction Ouest – Est, sont désormais au départ de l’Asie en direction du vieux continent et des Amériques.

Seulement, la Chine, qui n’a pas d’histoire coloniale et qui a su, au siècle dernier, garder ses distances des conflits mondiaux, se trouve aujourd’hui  en mesure d’entamer une nouvelle initiative d’envergure mondiale, après avoir entamé il y a une dizaine d’années une approche de développement et de coopération bilatérale. Cette démarche est fondée sur le partenariat gagnant - gagnant avec à la clé la non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats qui a vu naître le Forum Chine / Afrique, en 2006, suivi de peu par le Forum Chine / Monde arabe puis relayé par des instruments semblables avec les pays d’Amérique latine et, plus récemment, avec l’Union européenne, devenue entretemps le premier partenaire économique de la Chine. Cette initiative d’envergure planétaire a été lancée par le président chinois Xi Jinping il y a cinq ans sous l’appellation de projet «One Belt One Road», plus connue chez nous sous le nom de la «Nouvelle Route de la Soie ‘’. Ce programme ambitieux aux dimensions multiples - culturelle, économique, sociale, financière et politique - souvent qualifié par un plan Marshall du 21e siècle requiert deux principes fondamentaux :

  • le libre choix d’adhésion à ce projet chinois par les pays désireux d’y prendre part, sans pré- conditions ni contraintes.
  • la nécessité de s’astreindre à la philosophie du projet qui privilégie la connectivité, par mer, par air et par terre, ainsi que la connectivité virtuelle, garante d’une meilleure fluidité du commerce international dans le cadre de cette mondialisation économique.

La Tunisie, à l’instar d’autres pays arabes lors du dernier forum Chine-Monde Arabe tenu à Pékin en juillet dernier, a formulé le souhait de faire partie de cette initiative. C’est un début prometteur car, in fine, la Chine balisera sa coopération et ses investissements extérieurs, presque exclusivement à travers ce projet de la Route de la Soie.

A nous Tunisiens de définir nos priorités.

Comment la Tunisie peut-elle se positionner dans ce vaste programme, et comment peut-elle en tirer profit? Telle est la question qui doit être posée pour pouvoir établir les réponses conformes à nos souhaits et à nos intérêts. Tout d’abord, c’est à nous Tunisiens de définir nos priorités et d’exprimer nos besoins conformément à l’esprit et la lettre de la stratégie chinoise de la Route de la Soie. Ce choix est dicté certes par des considérations économiques, mais également politiques.

Ce qui me semble évident est que la Tunisie gagnerait beaucoup à s’investir pleinement dans cette initiative pour au moins deux raisons essentielles:

  • La diversification de nos partenaires économiques et financiers, devenue une nécessité pour faire face à une concurrence de plus en plus féroce et permettre un développement économique à moindre risque, qui s’inscrit pleinement dans le caractère mondialisé de l’économie internationale.
  • Le bon usage de la situation géographique de la Tunisie aux triples dimensions méditerranéenne, africaine et arabe vis-à-vis de ce géant asiatique qui observe cette région avec beaucoup d’intérêt, rappelant le caractère historique de la Route de la Soie médiévale.

A ce propos, en dehors du gain que la Tunisie peut engranger dans le cadre de ce projet, en termes d’infrastructure lourde (port maritime, aéroport, autoroutes, chemin de fer, etc. ) et autres outils de communication virtuelle ou non, domaine dans lequel la Chine est devenue une référence mondiale (téléphonie mobile , internet, etc.) , je me permettrais d’insister sur trois projets qui ont été initiés dans le cadre des activités du Conseil de coopération Tunisie-Chine sans résultats probants à ce jour et qui méritent, à mon humble avis, l’attention requise de nos gouvernants.

1- La mise en œuvre de l’accord financier qui a été signé par le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie avec son vis-à-vis chinois en décembre 2016, qui comporte un accord de Swap et parité yuan / dinar, qui nous permettra d’alléger notre dette de plus de 1,2 milliard de dollars américains, ce qui correspond à notre déficit commercial avec la Chine. Cet accord encore à l’étude entre les deux banques centrales requiert un geste politique de la part des autorités tunisiennes pour débloquer les négociations en cours. La Chine serait prête à faire le geste.

2- Le projet du pôle économique de Zarzis, qui traîne depuis plus de trois ans après que différentes entreprises chinoises ont exprimé leur intention d’investir dans le cadre d’un partenariat stratégique. Aucune réponse, affirmative ou négative, n’a émané de l’autorité tunisienne à ce jour, à ma connaissance. Ce projet, qui a duré dans le temps et qui risque d’être politisé à outrance, requiert une décision politique rapide par la mise en place, conformément aux lois en vigueur, d’une cellule de suivi de ce projet au sein de la présidence du gouvernement, après avoir identifié un vis-à-vis unique au partenaire stratégique désireux d’investir dans cette zone franche économique aux impacts hautement bénéfiques pour les cinq gouvernorats du sud tunisien.

3- L’insertion dès à présent de la Tunisie dans le domaine de l’économie virtuelle ou digitale. Dans ce domaine où la Chine - encore une fois excelle- considère la Tunisie qui bénéficie d’une infrastructure bancaire et financière valable, apte à devenir une plateforme pour des transactions futures en matière d’économie digitale pour tout le continent africain.

Les choix d’un peuple en quête de plus d’espoir et de sérénité 

A ce stade , il m’est permis de dire que si la Tunisie est aujourd’hui en proie à des hésitations en termes de choix stratégiques qui sont dictés par l’environnement régional et le contexte international, il est de son devoir de construire, malgré la fragilité politique et la précarité économique du moment - et qui ne fera que passer - sa souveraineté et son avenir. Il lui appartient de l’édifier sur des choix immuables qui sont l’intérêt national d’abord et les choix de notre peuple en quête de plus d’espoir et de sérénité pour son lendemain. Pour cela, il faut créer de nouvelles richesses. Mais aussi, rompre avec ce cercle vicieux qui consiste à ne regarder que la rive nord de la Méditerranée. Certes, l’histoire et la géographie ne changeront rien dans nos relations stratégiques avec nos voisins du nord. Au contraire, ils viendront nous féliciter le jour où nous aurons créé suffisamment de richesses et d’emplois dans la rive sud, même avec d’autres partenaires ou bien en partenariat avec eux, alors qu’on aura limité l’immigration illégale et son cortège de terrorisme, qui nous empoisonne la vie et qu’on réussira enfin à faire de la mare nostrum un véritable lac de paix, de sécurité et de prospérité commune.

Dans ce défi, la Tunisie sera pionnière

La Chine est désireuse de contribuer à cela dans le cadre de la Route de la Soie. C’est en tous les cas l’idéal pour lequel nous nous sommes investis avec des amis arabes, africains et européens à concrétiser dans le cadre de l’organisation méditerranéenne de la Route de la Soie. Parions que dans ce défi, la Tunisie sera pionnière, il ne tient qu’à nous de créer la synergie, pour qu’Africains, Arabes, Européens, Chinois et même Asiatiques puissions travailler ensemble pour concrétiser un monde interactif, culturellement, socialement et économiquement. C’est à ce prix qu’on aura gagné le pari de la mondialisation, en éradiquant les germes de la pauvreté, de la précarité, de la haine et de l’exclusion et en formant un monde plus solidaire et plus harmonieux.

M.S.B

Leaders consacre dans son numéro de Septembre 2018, en kiosques, un dossier spécial ‘’La Tunisie et Nous’’.

Le leader chinois de l’auto, SAIC développe avec Meninx Holding une usine de production de voitures MG en Tunisie
Depuis ce lundi, l’Afrique au grand complet en rendez-vous avec la Chine à Pékin
La Chine finance les études d’un pont à Djerba, du réseau ferré Gabès – Médenine et de l’extension de la zone économique de Zarzis
Déjà 18.000 touristes chinois ont visité la Tunisie depuis janvier 2018

Tout sur la participation de la Tunisie au Sommet Pékin 2018 Chine - Afrique

Comment Pékin se prépare pour accueillir ce lundi le Sommet Chine - Afrique (Photos)

Samir Majoul: Prendre toute notre place aux côtés d'un géant mondial, la Chine
L'ambassadeur de Chine à Tunis , Wang Wenbin: la Tunisie peut aspirer un rôle plus actif dans la coopération sino-africaine
Tunisie-Chine: les principaux repères

Hichem Elloumi: Les bonnes pistes pour les entreprises Tunisienne

La Chine annonce 8 nouvelles initiatives stratégiques pour l’Afrique et 60 milliards de dollars de financements
Document - Le discours intégral du président chinois, Xi Jinping au Sommet Chine-Afrique 2018

Youssef Chahed : Comment attirer l’investisseur chinois

Dr Basly Mohamed Sahbi: La Tunisie et l’ambitieux projet de «la Route de la soie»

Vous aimez cet article ? partagez-le avec vos amis ! Abonnez-vous
commenter cet article
0 Commentaires
X

Fly-out sidebar

This is an optional, fully widgetized sidebar. Show your latest posts, comments, etc. As is the rest of the menu, the sidebar too is fully color customizable.