L’éditeur et ancien président de l’Espérance, Mohamed Ben Smail est décédé
Il commençait déjà à nous manquer ces dernières années, se retirant petit-à-petit des éditions Cérès qu’il avait fondées il y a plus de 50 ans, en 1964, de l’Espérance Sportive de Tunis qu’il avait présidé juste après Chedly Zouiten, de la Radio-Télévision tunisienne qu’il avait dirigé, du Tennis Club, surtout, où il aimait retrouver tôt le matin ses amis… Mohamed Ben Smail s’est éteint à l’âge de 92 ans. L’enterrement aura lieu le samedi 7 juillet après la prière du dhohr au cimetière du Jellaz à Tunis. Le convoi partira du 12 impasse Ibn Chabbat, El Menzah 1, annonce la famille.
De retour à Tunis en 1954, avec une licence en Droit, il rejoindra Béchir Ben Yahmed lors de la fondation de l’hebdomadaire L’Action (l’ancêtre de Jeune-Afrique) conçu sur le modèle de L’Express, alors tout naissant sous la férule de Jean-Jacques Servan-Schreiber et Françoise Giroud, avec l’appui de Pierre Mendes France. Mohamed Ben Smail sera le pivot de cette brillante équipe de jeunes journalistes et intellectuels et militants progressistes qui donneront à l’indépendance dès sa proclamation, à la République à peine instaurée, toute sa sève et à la révolution algérienne tout le soutien médiatique dont elle avait besoin. Avec Mohamed Masmoudi, Habib Boularès, Jean Daniel, Guy Sitbon, Josette Ben Brahem et bien d’autres ils formeront alors une équipe exceptionnelle.
Cette exaltante période marquera à jamais Mohamed Ben Smail. Ne pouvant suivre Ben Yahmed, après son différend avec Bourguiba, dans l’exil de Jeune-Afrique à Rome, puis à Paris, il frayera son propre chemin, voguant entre des fonctions officielles et ses activités professionnelles. C’est ainsi qu’il fera ses premières armes dans le Commissariat au Tourisme, sera appelé à insuffler du sang neuf et une dose de démocratie à la Radio-Télévision tunisienne sclérosée en tant que PDG, puis au Conseil supérieur de la Communication (Présidence de la République), en qualité de président. Mais, l’œuvre la plus marquante de son parcours reste sans doute les éditions Cérès.
Un visionnaire
Avec de maigres moyens, il en fera une véritable institution, publiant des auteurs souvent peu en cour auprès de Carthage et de la Kasbah, prenant le risque en plus d’éditer des ouvrages guère assurés de gros tirages, courant en plus l’aventure de créer une imprimerie (Les Imprimeries Réunies), misant sur la fondation d’une des toutes premières agences-conseils en communication, Cérès (précédée en pilote de Label qui fera par la suite sa propre destinée sous l’enseigne aujourd’hui d’Ogilvy). Aussi, reprenant un petit hôtel, Le Carlton, racheté par son père au centre-ville de la capitale, il saura le développer et en faire un bel établissement hôtelier de ville.
Sur la trace de leur père, ses deux fils, Karim et Rachid, n’ont jamais cessé de poursuivre son œuvre. En la mettant au goût du temps.
Issu d’une famille de jerbiens versée dans le commerce (son propre père était établi en Algérie), Mohamed Ben Smail réussira le difficile défi d’adosser son engagement patriotique et intellectuel, par souci d’indépendance, à des entreprises, loin de bénéficier d’une rente assurée, mais malgré leurs spécificités sont bien gérées.
Une très belle plume, un grand éditeur, un éminent communicateur et un sportif dans l’âme : Mohamed Ben Smail aura été une illustre figure de ces jeunes Tunisiens qui ont donné à l’indépendance fraichement conquise toute sa splendeur, au pays son cap démocratique.
L’interview portrait publiée par notre excellente Alya Hamza, dans le journal La Presse, le 18 avril lève un coin sur un parcours croisé.
Allah Yerhamou.
Taoufik Habaieb
Photo Cérès
Faire-part
Mohamed Ben Smail s'est éteint aujourd'hui, 6 juillet 2018.
Son épouse Josette Varvaro, ses fils Karim et Rachid, ses petits-enfants Taïz, Youssef, Amine et Amina, ses belles-filles Nédra Karray et Michelle Barbara, ses neveux et nièces, Ridha, Radhia et Raja Boubekri, les familles Ben Smail, Najar, Varvaro, Boubekri, Karray, Barbara, Mahsni, Thabet et les familles parentes et alliées ont le regret de vous annoncer son décès.
L’enterrement aura lieu le samedi 7 juillet après la prière du dhohr au cimetière du Jellaz à Tunis. Le convoi partira du 12 impasse Ibn Chabbat, El Menzah 1.