Chahed - Tabboubi : de l'entente cordiale à la confrontation
Mais quelle mouche a donc piqué Noureddine Taboubi pour passer, avec la dextérité d'un transformiste, d’un fervent partisan de Youssef Chahed à un ennemi juré, réclamant sa démission "ici et mainenant", sans même attendre les élections municipales ? Pourquoi toutes ces rodomontades, cette arrogance, ce langage guerrier d’autant plus incongru qu’il sort de la bouche du premier responsable d’une organisation lauréate du Prix Nobel de la Paix ? Cette volonté de faire plier l’Etat alors qu’il en connaît les risques ? Pourquoi ces menaces de mobilisation de la rue, cet acharnement contre le gouvernement et particulièrement son chef ?
Il est vrai que le secrétaire général de l'Ugtt peut tout se permettre aujourd'hui. Il détient le pouvoir réel. Il est le maître de la rue. Les partis se bousculent au portillon du siège de l'Ugtt pour faire acte d'allégeance. On peut calomnier le président de la Republique, critiquer n'importe quel ministre, mais quand il s'agit du secrétaire général on tourne sept fois la langue avant d'émettre la moindre critique à son encontre.
Dans ce face à face entre Chahed et Taboubi, c'est toujours le deuxième qui a le beau rôle. Rares sont ceux qui se sont interrogés sur ce virage surprenant à 180°, sur le bien-fondé de ses accusations contre le chef de Gouvernement. Mais qui a détruit l'économie ces dernières années ? Les différents gouvernements et pas seulement celui de Chahed portent certes, une lourde responsabilité dans cette crise économique, mais la centrale syndicale y est certainement pour beaucoup avec sa ferveur revendicatrice et sa tendance à lâcher la bride à sa base, même quand elle est dans son tort.
A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. L’Etat fondé par Bourguiba n’étant plus ce qu’il était, on peut d'ores et déjà imaginer le scénario qui nous attend : l'Ugtt obtiendra tout ce qu'elle voudra : Chahed sera sacrifié sur l’autel de la raison d’Etat ; le nouveau gouvernement essaiera de redresser la situation, mais il se heurtera aux syndicats et finira par connaître le même sort que ses devanciers, les mêmes causes produisant les mêmes effets ; les élections seront renvoyées aux calendes grecques après l'avoir été à deux reprises et les institutions financières si décriées par nos syndicats, lassées par une telle instabilité, ne voudront plus prêter leur argent.
On vous laisse imaginer la suite.