Lettre ouverte au chef du Gouvernement: des Médecins Hospitalo-universitaires tirent la sonnette d'alarme
Un collectif composé de 387 Médecins Hospitalo-universitaires, dont 292 professeurs et Maitres de Conférences Agrégés et 94 Chefs de services nous a fait parvenir cette lettre ouverte qu'il vient d'adresser au chef de Gouvernement. Le collectif y fait part de ses «inquiétudes face à l'accumulation de problèmes structurels apparus depuis plusieurs années et l'absence de réformes adaptées» et «appelle à la mise en oeuvre d'un plan de sauvetage immédiat, en attendant une réforme profonde et globale du système de santé».
Partout dans le monde, la médecine académique est assurée par les structures universitaires de santé publique, à travers les trois fonctions de soins, d'enseignement et de recherche. Dans ce domaine, la Tunisie a connu des années de gloire depuis la création des facultés de médecine et des hôpitaux universitaires. La médecine tunisienne s'est ainsi distinguée par des réalisations multiples qui ont eu un impact positif sur la santé du citoyen tunisien et une reconnaissance internationale ayant permis le développement d'un secteur économique lié à l'exportation des services de santé.
Cependant, devant l'accumulation actuelle de problèmes structurels apparus depuis plusieurs années et l'absence de réformes adaptées, ces acquis et notamment la santé du citoyen tunisien, sont plus que jamais menacés.
Nous, médecins hospitalo-universitaires, lançons ainsi un cri d'alarme quant à la situation dramatique à laquelle est arrivée la santé publique. En effet, les insuffisances flagrantes des ressources matérielles et humaines, constatées aujourd'hui, ainsi que les défaillances de gestion et de gouvernance, sont à l'origine d'une dégradation vertigineuse des services de soins et des conditions de travail dans les hôpitaux, notamment universitaires. Actuellement, nous vivons une crise sans précédent avec une menace sérieuse, dans un premier temps, de paralysie des hôpitaux publics, en raison principalement du déficit budgétaire (700 milliards de dettes) et du départ massif de nos médecins, puis dans un deuxième temps une dégradation des soins dans les deux secteurs ; public et privé, par défaut de personnel médical et paramédical suffisamment formé.
Monsieur le Chef du Gouvernement, en attendant une réforme profonde et globale du système de santé, la mise en oeuvre d'un plan de sauvetage immédiat, est impérative. Elle a été exprimée par tous les acteurs du système et à différentes occasions (« Dialogue Sociétal », séminaire «Hôpital de demain», «Appel pour sauver le secteur public de la santé» signé par plusieurs organismes et associations...)
Nous, soussignés, médecins hospitalo-universitaires, conscients de la gravité de la situation, appelons, dans le cadre d'une approche participative, à:
- Mobiliser des ressources additionnelles pour résoudre les difficultés financières des hôpitaux (comme cela a été possible pour les secteurs du tourisme et des banques)
- Mettre en place de nouvelles mesures afin d'améliorer les conditions de travail et la situation matérielle des médecins universitaires, afin d'atténuer l'hémorragie des départs et encourager les jeunes médecins à rejoindre la carrière universitaire.
- Passer rapidement à la gestion par objectifs dans la gouvernance des hôpitaux.
Monsieur le Chef du gouvernement, étant parmi les principaux acteurs du système de la santé, nous estimons, qu'il est de notre devoir de tirer la sonnette d'alarme devant ces problèmes qui menacent non seulement le secteur de la santé publique mais aussi l'avenir de la médecine tunisienne.
Signataires : 387 Médecins Hospitalo-universitaires,
dont 292 professeurs et Maitres de Conférences Agrégés et 94 Chefs de services.