Tunisiennes amoureuses de non-musulmans, mariez-vous ! La circulaire de 1973 est complètement démantelée
C’est fait ! L’interdiction de mariage entre une femme tunisienne musulmane et un non-musulman, jadis consacrée par la fameuse circulaire N° 216 du 5 novembre 1973 est complètement levée. Vivement « demandée » au ministre de la Justice et au chef du gouvernement par le président Béji Caïd Essebsi lors de son discours du 13 août 2017, cette mesure est aujourd’hui effective. Les mariages concernés peuvent désormais être librement actés dans toute municipalité ou chez un notaire en Tunisie ou auprès des consulats, et à défaut, des ambassades de Tunisie à l’étranger.
Il faut dire qu'il n'était guère facile à mettre œuvre la recommandation du chef de l'Etat en moins d’un mois seulement, tant la démarche est complexe. Il fallait en effet suivre tout un cheminement juridique pointilleux pour annuler pas moins de 7 circulaires qui étaient jusque-là en vigueur.
C’est ainsi que le chef du gouvernement a notifié par lettre adressée au ministre de la Justice, le 8 septembre courant, sa décision d’annuler le texte N° 606, daté du 19 octobre 1973, constituant la norme juridique de la circulaire interprétative et explicative du 5 novembre 1973. Le jour-même, le ministre de la Justice a instruit les premiers présidents et procureurs généraux des cours d’appel, les présidents de tribunaux de première instance et les procureurs généraux de la République, les juges cantonaux et les officiers d’Etat civil, de l’annulation de la circulaire du 5 novembre 1973.
De leur côté, les ministres de l’Environnement et du Développement local (qui assure la tutelle des municipalités) et des Affaires étrangères (au titre des Affaires consulaires) ont procédé à l’annulation des anciennes circulaires prises en la matière. La batterie des textes règlementaires compte en effet 7 circulaires dont notamment:
- La circulaire N° 23, datée du 17 mars 1962, du secrétaire d’Etat à l’Intérieur, adressée aux officiers d’Etat civil, relative aux contrats de mariage entre femme musulmane et un non musulman,
- La circulaire N° 216, datée du 5 novembre 1973, du ministre de la Justice,
- La circulaire N° 81, datée du 30 mars 1987, du ministre de l’Intérieur,
- La circulaire N° 3631, datée du 27 novembre 1992, du ministre des Affaires étrangères,
- La circulaire N° 56, datée du 23 novembre 2004, du ministre de l’Intérieur et du Développement local.
La mise en œuvre de la « recommandation » du président de la République devait ainsi démanteler tous ces textes, et non procéder à une simple annulation de la circulaire de novembre 1973. Cela risque de créer des annulations de mariage au niveau du parquet et remettre en question l’initiative de Caïd Essebsi. Le ministère de la Justice n’est pas en effet l’auteur de la circulaire. Mais tous les registres d’Etat civil, tenus par les officiers d’Etat civil et notaires sont transmis au parquet qui procède à leur vérification. En cas de non-conformité, il prononce l’annulation de tout acte relevé. D’où l’importance de la notification d’annulation de la circulaire de 1973, par le ministère de la Justice à l’ensemble des concernés.