L’Etat dans tous ses états!
Abderrahmane Ibn Khaldoun, le plus illustre des historiens, sociologues et penseurs tunisiens dans Al Muqaddima a écrit: «La justice est le fondement de toute civilisation. Elle est également capitale pour l’instauration d’un état de droit, comme elle est la garante de la démocratie et du respect des droits de l’homme.»
Un déficit ou carrément l’absence d’application de la loi implique la fin de toute civilisation, puisque la vie serait gérée par ce qu’on appelle la loi de la jungle qui sévit dans les situations d’anarchie.
Décidément, dans «le pays de la démocratie et des droits de l’homme» les bouffonneries et les scandales se suivent et se ressemblent à un rythme effréné et effrayant.
Ce qui se passe ces derniers temps sur la scène politique tunisienne n’incite pas du tout à l’optimisme, tant et si bien qu’on a la nette impression que la démocratie rime avec l’anarchie et la gabegie.
Immédiatement après la triste affaire de Petrofac, qui a tenu en haleine tout le pays pendant huit longs et interminables mois, puis celle du blocage de production de phosphates à Metlaoui, nous avons eu droit à une énième aberration surréaliste. Au moment où la Tunisie s’est engagée dans une lutte infernale contre la faillite économique et le terrorisme, l’affaire de Jemna a défrayé la chronique en accaparant le devant de l’actualité nationale : un groupe de citoyens hors la loi, conduit par une association hautement douteuse relevant des ligues de protection de la révolution, s’est approprié illégalement un palmeraie à Jemna de plusieurs milliers d’hectares, propriété de l’état.
Malgré l’opposition de l’exécutif et un jugement du tribunal de Kebili en faveur du contentieux de l’Etat, la vente aux enchères d’une récolte de dattes a scandaleusement eu lieu, rapportant à l’association la modique somme de 1,7 million de dinars …
Elle a été finalement cédée à un homme d’affaires très louche, proche du mouvement Ennahdha, qui s’est une énième fois illustrée par une duplicité hypocrite, très chère aux islamistes.
Ainsi cette triste affaire porte un coup fatal à la crédibilité des autorités et du gouvernement et traduit la gravité du désordre et de l’anarchie dans lesquels le pays s’enlise irrémédiablement.
Dans un élan populiste exécrable, un nouveau palier dans l’absurde a été atteint. Certains politicards et députés opportunistes à souhait ont ouvertement donné leur bénédiction à ce hold-up caractérisé, sans tenir compte de l’intérêt suprême de la nation et des menaces qui guettent la paix sociale.
Pour récolter quelques misérables poignées de voix de plus aux prochaines échéances électorales, ces démagogues et prédateurs de gros calibres, n’ont pas hésité à bafouer et à jeter dans les poubelles les lois de la constitution, alors qu’ils sont censés être les premiers à les défendre.
Enfin, je ne peux passer sous silence les incessants tiraillements de l’UGTT, qui n’a jamais été aussi remuante voire agressive, faisant preuve d’un acharnement sans précédent contre le gouvernement Youssef Chahed, pourtant fraichement élu.
Persévérant dans sa politique sadique du «niet», elle rejette le projet du budget de l’état 2017 quelques jours après le refus de la proposition du gouvernement de reporter à 2019 les augmentations salariales prévues pour 2017.
Autant dire que ce «niet» systématique de la centrale syndicale est contre-productif dans la mesure où il va créer inéluctablement une atmosphère sociale délétère, dont les conséquences seront imprévisibles.
Désormais, notre malheureuse démocratie dégénère chaque jour d’avantage en véritable anarchie, ou tous les dépassements, les coups bas et les trahisons sont permis et ou la règle démocratique est devenue la loi de la jungle.
Ainsi l’avenir de notre pays devient de plus en plus sombre et incertain, semé régulièrement d’embuches et d’obstacles, mais le plus grand écueil est incontestablement cette race d’hommes politiques opportunistes, hypocrites, peu crédibles, sans moralité et avides de pouvoir …
Alors que le pays s’apprête à vivre une année 2017 exceptionnellement laborieuse et à quelques semaines de la tenue de la conférence internationale sur l’investissement «Tunisie 2020» nous adressons une image calamiteuse de notre pays au monde entier.
Le leader Habib Bourguiba, en grand stratège et en visionnaire hors du commun avait vu juste en disant:
«J’ai fondé un état libre libre, indépendant et souverain. J’ai construit des relations diplomatiques solides et respectueuses de ce pays, des Amériques à la Chine. S’il survenait un jour malheur à la Tunisie, il ne viendrait que de ses propres enfants, mais jamais de l’étranger.»
Dr Sami El Mekki
Medecin-Pneumologue