La question palestinienne… en Tunisie, à l’ONU et… l’aide colossale des Etats Unis à Israël
Certains essaient, par tous les moyens, de mettre « backburner » (en veilleuse) la question palestinienne. La Tunisie leur inflige régulièrement un cinglant démenti. Ainsi, M. le Président de la République, a rappelé au monde, du haut de la tribune des Nations Unies à New York, l’acuité de cette question car, en ce XXIème siècle, le peuple palestinien est le seul au monde à lutter contre un pouvoir colonial et raciste. L’ARP a voté dernièrement une résolution de soutien aux députés palestiniens de Ramallah*. Les manifestations populaires (partis, ONG, associations…) en faveur des Palestiniens sont fréquentes dans notre pays et l’interview du Président Abbas (émission « Café arabe ») par la TV1 a même été rediffusée lundi 26 septembre.
Une aide américaine monumentale à Israël
Il est de notoriété publique que les relations entre le Président Obama et le Premier Ministre israélien sont exécrables. C’est ainsi que ce dernier s’est adressé au Congrès à majorité républicaine à Washington, en mars dernier, pour fustiger l’accord sur le nucléaire iranien proposé par le Président américain. Fait absolument exceptionnel :à cette occasion, Netanyahou n’avait pas été reçu à la Maison Blanche comme il est de tradition quand un politicien de haut rang est dans la capitale.En fait, Israël ne prête aucune attention aux remarques américaines sur la colonisation illégale de la Cisjordanie et ne cesse d’infliger des rebuffades aux timides tentatives de paix américaines et de faillir aux engagements pris pour la circulation au pont Allenby ou la G4 en Palestine occupée. Ce qui vient de mettre hors de lui M. John Kerry, lundi 19 septembre 2016, à New York, au cours d’une réunion privée, aux dires de diplomates occidentaux présents (Haaretz, 25 septembre 2016).
Il n’en demeure pas moins qu’en dépit du comportement extraordinairement désinvolte et déplacé des responsables israéliens et après moult tractations cependant, Washington vient d’accorder à l’Etat sioniste une colossale aide militaire de 38 milliards de dollars pour la période allant de 2019 à 2028 en imposant cependant qu’au bout d six ans, les armes doivent être achetées aux Etats Unis. Sur la période 2008-2018, cette aide se montait à 30 milliards de dollars, une enveloppe dont Netanyahou réclamait l’augmentation avec insistance. Pourtant, l’extrémiste ministre de la Défense sioniste AvigdorLiberman– vivement opposé au dégel des relations irano-américaines- avait comparé cet accord avec l’Iran à la capitulation diplomatique face à Hitler, en 1938, à Munich. Fureur de la Maison Blanche et retraite élastique de Liberman ! Les Américains n’ont pas tenu rigueur à Netanyahou pour sa déclaration insultante comparant ceux qui, comme les Américains, réclament l’évacuation des colonies implantées en Cisjordanie à des partisans du « nettoyage ethnique » des juifs. Comme l’écrit Piotr Smolar dans Le Monde (15 septembre 2016,p. 5), cette infâme sortie de Libermanet celle –odieuse- de son chef ont été « sans conséquence » et les Américains – toute indignité bue- ont quand même dit banco ! Selon les termes mêmes du Département d’Etat, il s’agit du « plus important engagement d’assistance militaire bilatérale dans l’histoire des Etats Unis ». Devant cette dotation astronomique, les miettes consenties à l’Egypte pour sa reconnaissance d’Israël avec échange d’ambassadeur paraissent parfaitement dérisoires. Cette immense somme prouve, s’il en était besoin, qu’Israël n’est rien d’autre qu’un porte-avion américain fiché au flan d’un Moyen-Orient gorgé de pétrole et qu’Israël est une base avancée des intérêts étasuniens dans la région. A cet égard, l’analyse du regretté Maxime
Rodinson n’a rien perdu de sa pertinence
Notons encore qu’on peut se demander si réellement Israël avait besoin de cette manne pour continuer à assassiner les enfants palestiniens ou à leur loger des balles dans le genou pour handicaper à vie ces jeunes et en faire une charge pour la société (lire AmiraHass, Haaretz, 27 août 2016) , à faire mourir à petit feu les prisonniers palestiniens, à détruire leurs maisons, à pourchasser les bédouins du Néguev et à bombarder indéfiniment Gaza. C’est ainsi que jeudi 15 septembre 2016, la soldatesque sioniste a tué chez lui, Mohammed Asrahin de Beit Ula en Cisjordanie occupée en donnant l’assaut à sa maison pour l’arrêter. Comme elle n’a nullement hésité à assassiner une enfant de dix ans une paire de ciseaux à la main devant un check point. « Abattue pour « protéger» des soldats qu’elle s’apprêtait sans doute à découper… Car c’est bien connu, tout citoyen palestinien est un colis suspect, une bombe à retardement.» écrit Gidéon Lévy (Le Monde Diplomatique, octobre 2016,p. 10)
Le Pr Pappé note : « Israël possède la seconde armée au monde sur le plan technologique et jouit d’une confortable balance commerciale de 500 milliards de dollars en réserves étrangères. » (Lire Pr Ilan Pappé, « La propagande d’Israël », Investig’Action éditeur, 2016, Bruxelles, p. 14). Mais relève Gidéon Lévy : « Nos gouvernants orchestrent des campagnes de peur. Ils exagèrent les dangers réels, en inventent d’autres et alimentent l’idée que nous serions victimes de persécutions constantes. Et cela depuis la création de l’Etat. »
Que pensent les Américains de ces libéralités énormes consenties à Israël?
Dans un pays où 43 millions de citoyens n’ont pas la moindre couverture sociale et où le nombre de sans-abris ne cesse d’augmenter, ces sommes consenties à un pays étranger par le gouvernement américain ne manquent pas d’étonner. Dans un pays où, affirme The New York Times du 26 septembre 2016, le nombre d’assassinats a augmenté de 10,8% entre 2014 et 2015 selon le FBI. Dans un pays où la ville de Chicago – la troisième plus grande métropole des Etats Unis- a enregistré durant le seul mois d’août 2016, 90 assassinats (The New York Times du 1er septembre 2016), 481 homicides et 3000 blessures par balles depuis le début de l’année (Chicago Tribune du 2 septembre 2016), on se demande si ces dollars déversés sur Israël n’auraient pas mieux servi at home pour juguler cette violence démente….ou mieux mourir les écoliers comme le dit le cinéaste Michaël Moore dans son dernier film (Where to invadenext) !
Le 5 juillet 2015, David Horovitz rendait compte dans The Times of Israël d’un sondage effectué par Frank Luntz– un consultant politique réputé, spécialiste du parti républicain des Etats Unis- auprès de l’élite des démocrates américains, des citoyens politiquement actifs, hautement diplômés et gagnant bien leur vie. 76% des démocrates interrogés ont répondu oui à la question : « Israëla-t-il trop d’influence sur la politique étrangère américaine ? » et 20% seulement des républicains. « Israël est-il raciste ? » Oui pour 47% des démocrates et 17% des républicains. « Les colonies israéliennes sont-elles un obstacle à la paix ? » oui, selon 75% des démocrates et 25% des républicains. Ce n’est pas tout, écrit l’ancien correspondant de France 2 à Jérusalem Charles Enderlin : 33% des démocrates et 22% des républicains considèrent qu’Israël reçoit des milliards de dollars qui devraient aller aux citoyens américains. En conclusion du sondage de Luntz : 50% des démocrates et 18% des républicains sont d’accord avec cette proposition : « Les juifs qualifient trop souvent d’antisémite la critique d’Israël ». Rappelons ici que le 2 novembre 2003, The Observer (Londres) affirmait qu’un sondage européen décrit Israël comme une menace pour la paix, menace bien plus grave bien que celle que représentent la Corée du Nord, l’Afghanistan et l’Iran. L’échantillon comprenait 500 personnes dans chacun des pays de l’Union Européenne. Le sondage avait été commandé par El Pais (Madrid) et l’International Herald Tribune lors de la première Intifada alors qu’Ariel Sharon était aux commandes.
Un député arabe israélien et Ban Ki Moon condamnent Netanyahou
Dans une des odieuses déclarations (vidéo cette fois) dont il a le secret, Netanyahou a osé dire que les gens qui s’opposent à la colonisation sioniste de la Cisjordanie visent en fait au « nettoyage ethnique des juifs ». M. AhmedTibi vice-président de la Knesset (Parlement israélien), député de la Liste Commune Arabe et leader du parti Ta’al (Le Mouvement arabe pour le changement) écrit dans le quotidien Haaretz (11 septembre 2016) : « Si M. Netanyahou veut vraiment savoir ce que nettoyage ethnique veut dire, il devrait le demander aux citoyens palestiniens d’Israël. 85% des Palestiniens qui vivaient dans ce qui est aujourd’hui Israël ont été forcés de quitter le pays en 1948 tout simplement parce qu’ils n’étaient pas juifs ». Et M. Tibi de poursuivre : « Comparer les citoyens palestiniens d’Israël aux colons illégaux en Palestine occupée est non seulement immoral mais aussi à mille lieues de toute rationalité, des données historiques et des obligations internationales d’Israël. Le Premier Ministre devrait réaliser que quel que soit le système institutionnalisé de discrimination mis en place, ceci est notre patrie ; on y est et on y reste….Nous ne sommes pas des colons israéliens M. Netanyahou. Nous comparer à des occupants illégaux étrangers reflète seulement votre intime conviction que nul autre - les juifs exceptés- n’a le droit de considérer cet endroit comme sa patrie. Plus de 1,5 million de Palestiniens en Israël continueront à défier votre attitude raciste et votre déni systématique des droits humains y compris la douzaine de lois qui ne visent que les non-juifs en Israël. » M.Tibi conseille à Netanyahou d’aller au tristement célèbre « Canada Park » - parc qui a inspiré au grand écrivain palestinien d’Israël Emile Habibiune grinçante comédie- pour savoir ce que « nettoyage ethnique » veut dire. Cet espace se trouve sur les villages détruits d’Imwas, Yalu et Beit Nuba. Il demande aussi au Premier Ministre de se rappeler ses propres « héros » Menachem Begin et Yitzhak Shamir, responsables du nettoyage ethnique des Palestiniens. Il lui conseille enfin la lecture du livre du Pr Ilan Pappé «Le nettoyage ethnique de la Palestine » dans lequel ce savant historien décrit méthodiquement comment les Israéliens ont procédé au nettoyage ethnique de plus de 400 villages arabes en 1948. Et M. Ahmed Tibi de poursuivre : « Les colonies israéliennes illégales en Palestine occupée ne sont pas « d’anciennes communautés juives qui y ont élit domicile depuis 3000 ans** »mais des structures coloniales visant à systématiquement dénier aux Palestiniens le droit à l’autodétermination. Elles sont illégales non parce que juives mais simplement parce qu’elles colonisent un territoire occupé. Un point c’est tout. Permettez-moi M. Netanyahou de poser une question : Israël a-t-il jamais demandé aux Palestiniens d’adopter les colons israéliens comme des citoyens palestiniens ? La réponse est non. Bien au contraire, lors des négociations, Israël a utilisé les colonies israéliennes comme prétexte pour annexer plus de terres palestiniennes….Vous n’arriverez jamais à faire de nous des étrangers sur notre propre sol ». Il cite en conclusion le poème du fils du village d’El Birwa, Mahmoud Darwich : « Et ici je suis. Je suis moi. Et ici est ici. Je suis moi. Et ici je suis. Ici ». C’est le message d’un million et demi de citoyens palestiniens à Netanyahou et à sa novlangue raciste.
Notons que M. Ban Ki Moon a aussi condamné la vidéo raciste de Netanyahou comme « inacceptable et scandaleuse » et le Secrétaire Général de l’ONU d’ajouter que « les colonies constituent un obstacle pour la paix.»(Haaretz, 15 septembre 2016).
De son côté, M. Murray McCully, le ministre des Affaires Etrangères de l’Australie et actuel Président du Conseil de Sécurité de l’ONU, a condamné le ministre israélien des Affaires Etrangères qui a décidé de boycotter Nicolay Mladenov, envoyé spécial de l’ONU pour le Moyen-Orient. L’arrogance de Netanyahou et de sa clique de racistes« risque de faire perdre la démocratie aux israéliens et constitue peut-être un plus grand danger que le terrorisme » écrit un écrivain israélien.
Mais peu importe aux Américains ces scandaleuses décisions de la clique extrémiste et raciste au pouvoir en Israël : elles sont « sans importance » ! C’est pourquoi ils leur ouvrent une ligne de crédit de 38 milliards pour s’armer. S’armer indéfiniment. S’armer éternellement…car, pour Israël, le danger, le vrai, c’est la paix !
Forte de son bon droit, la Palestine- épaulée par la Tunisie et tous les humains épris de justice et de paix – réclamera toujours haut et fort ses territoires et son Etat. Ainsi, sa juste cause ne sera jamais « back burner » !
Mohamed Larbi Bouguerra
*Netanyahou, la semaine dernière et à l’ONU, a proposé au Pdt Abbas de venir s’adresser à la Knesset et voudrait aller, lui, à Ramallah, parler aux députés palestiniens oubliant qu'un grand nombre de ces représentants du peuple palestinien sont aujourd’hui dans les geôles d’Israël…et qu’il n’arrête pas d’autoriser colonies illégales et confiscation des terres palestiniennes !
** Yitzhak Rabin affirmait que la Bible n’est pas un acte de propriété.
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