Youssef Chahed: Mon premier mois à la Kasbah
Lorsqu’on lui demande ce qui a le plus marqué son premier mois à la Kasbah, le nouveau chef du gouvernement Youssef Chahed répond comme surpris : « Un mois déjà ! ». Il sait pourtant que tout s’accélère. D’emblée, l’atterrissage a été très mouvementé : Kasserine, Fernana, Petrofac... Les urgences n'ont pas manqué . Tôt le matin, il est à l’ouvrage. A huit heures, il a déjà commencé la deuxième séquence de sa journée, après avoir lu le courrier et la presse, et passé ses premiers coups de fil.
Serein, gardant la tête froide, malgré tant d’effervescence dans le pays, Chahed s’aménage des séquences de réflexion et d’écriture. Ce matin-là, en bras de chemise, appuyé contre son bureau (sans le moindre parapheur ou dossier, tout ayant été traité), il burine sur un bloc-notes, avec un simple stylo à bille, son discours-programme. «Les Tunisiens sont impatients, mais ne sauraient se contenter du superflu», lâche-t-il. Comme pour toutes ses précédentes interventions, Youssef Chahed se nourrit de notes, mais écrit lui-même ses textes. Cela lui permet de prendre le temps d’y réfléchir encore plus en profondeur, de trouver les mots justes, simples et directs, d’éviter toute logomachie «زخـــم» et de faire court. Il le remettra sur le métier et le reprendra plus d’une fois pour le ciseler, puis le confiera à ses conseillers... pour le tailler davantage.
«Ce programme sera notre contrat, confie le chef du gouvernement. Il doit indiquer clairement le comment et fixer précisément les délais. Ses enjeux seront la stabilisation générale, le rééquilibrage des finances publiques, la traque de la corruption, le redéploiement économique et le développement des régions. Mais aussi la santé, l’éducation, le savoir, la jeunesse, la culture, la société dans son ensemble. J’y attache la plus grande importance.» Présenté début octobre, le programme sera un prélude à l’introduction devant l’Assemblée des représentants du peuple de la loi de finances complémentaire, du budget de l’Etat pour 2017 et de la nouvelle loi de finances. Il servira également d’argumentaire pour les débats sur le Plan de développement et d’engagements à l’occasion de la conférence internationale sur l’investissement, fin novembre prochain.
Les leviers utiles de la loi d’urgence économique
Une grande opportunité s’offre d’ores et déjà à Youssef Chahed : la nouvelle loi d’urgence économique : elle doit permettre de débloquer immédiatement les autorisations et procédures qui entravent l’investissement, autoriser à titre exceptionnel, en fonction de la nature des projets et de leur importance, les concessions, les contrats de gré à gré et ceux de PPP, la passation de marchés, le changement de vocation pour certains terrains agricoles et autres facilités. Un statut de projets d’intérêt national et de grands projets est ainsi défini et le mandat dérogatoire sollicité pour la prise de ces décisions d’urgence sera limité à une période de trois ans. Initialement composée de quatre articles, le projet de loi a été enrichi en commission à l’ARP pour se détailler en seize articles.
«Ce sera un acquis précieux, s’impatiente Youssef Chahed. Un seul vis-à-vis, placé sous l’autorité directe du chef du gouvernement, délivrera à l’investisseur en un document unique toutes les autorisations requises. Vous vous imaginez le temps gagné et l’efficacité garantie ?»
D’ici la fin de l’année, l’agenda du chef du gouvernement est bien garni. En relief, des visites stratégiques à l’étranger (Algérie, etc.), des tournées régionales et des concertations régulières avec les signataires de l’Accord de Carthage, les autres partis politiques, organisations nationales, et autres composantes de la société civile. Sans compter les imprévus...
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