Le chiffre est effarant! Rien que dans le Grand Tunis, sur les 3000 tonnes d’ordures enlevées chaque jour, pas moins de 1000 tonnes est laissé à l’abandon dans des sites anarchiques. Que dire tous ces immondices abandonnées qui souillent nos quartiers. Ne vous demandez plus pourquoi il y a alors tant de chiens errants, et de risques de contamination. Le désastre est d’autant plus grave qu’aucune solution efficace n’est à l’horizon. Une ré-architecture du ministère de l’Environnement et fusion avec la Direction générale des Collectivités locales est indispensable.Tous les nouveaux locataires de la Kasbah s’éreintent pourtant à promettre une guerre implacable contre les déchets sans, finalement, y parvenir. Cette fois, Youssef Chahed semble y avoir des raisons particulières et des solutions appropriées. Leaders est en mesure de vous en livrer des révélations exclusives.
Tout remonte à il y a quelques semaines lorsque la question était mise en débat au cours d’un conseil ministériel. Ministre des Affaires locales, en prise directe avec les municipalités, délégations et gouvernorats, Chahed relevait l’impuissance des collectivités locales à endiguer ce grand flot des déchets. Manque de moyens (tracteurs, camions et bennes), d’effectifs et surtout de décharges publiques contrôlées, de centres de tri et d’unités de traitement et de revalorisation. Si la collecte relève des municipalités, le reste appartient au ministère de l’Environnement, principalement l’Agence nationale de la gestion des déchets (
ANGED). Pionnière en Afrique lors de sa création, il y a plus de 10 ans, en aout 2005, elle a rapidement battu de l’aile depuis la révolution, submergée de toute part, plombée par tout ce qui a affecté l’Administration.
La chaine est rompue entre municipalités et ANGED. En tout et pour tout, la Tunisie ne dispose que de 49 centrs de collecte et de transfert. Toutes étaient aménagées avant 2011. Aucune nouvelle station depuis lors. En tournée dans les régions, Youssef Chahed l’a constaté. Pire encore, tout récemment à Tozeur, il a eu la surprise de tomber sur une unité de traitement flambant neuve, laissée cependant fermée pour la simple raison qu’il n’y a de station de collecte appropriée.
De vifs échanges en Conseil des ministres
Inutile de dire que les échanges entre le Ministre de l’Environnement Néjib Derouiche et son collègue des Affaires locales, Youssef Chahed étaient très vifs. En trois diapositives seulement présentées devant le chef du Gouvernement, Chahed a démonté la filière rompue, démontré les insuffisances et esquissé les solutions. Ancien Secrétaire d’Etat à l’Environnement (5 septembre 2002 – 16 juin 2003) et longtemps chef de cabinet 1997 – 2002), puis Ministre de l’Intérieur (2011),
Habib Essid n’ignore en rien cette problématique. Il ne pouvait ce jour-là qu’arbitrer en faveur de Chahed, décider l’arrêt de l’enfouissement des ordures, la multiplication des décharges contrôlées et stations de traitement et de revalorisation, et plus étroite collaboration entre l’ANGED et les collectivités locales. Sans en tenir compte, des marchés d’enfouissement pour une somme de plus de 600 MD et une durée de 5 ans, jusqu’en 2021 ont cependant été passés…
La décision est prise
A peine chargé de former le nouveau gouvernement, Chahed envisagera immédiatement de fusionner l’Environnement et la Direction générale des Collectivités locales. Avec les nouvelles dispositions constitutionnelles de décentralisation et l’extension de la couverture municipale (désormais 365 municipalités) à l’ensemble du territoire, l’initiative trouve sa pleine justification. La Caisse des Prêts et de Soutien des Collectivités Locales
CSPCL), cette banque des municipalités se tient disposée à financer des stations et pourquoi pas des projets communs entre municipalités voisines.
La nouvelle architecture du ministère de l’Environnement ne sera alors que l’amorce de tout un plan. Reste à savoir qui sera le ministre pour le concevoir et le faire aboutir.
Taoufik Habaieb