Le chômage féminin, un défi majeur pour le modèle sociétal tunisien
Entre 2004 et 2014, le nombre de Tunisiennes au chômage est passé de 140 000 à 268 700. Lors de la même période, le nombre de chômeurs hommes est passé de 292 400 à 303 000 seulement. Le volume du chômage féminin a quasiment doublé endixans,alorsque celui du chômage masculin est resté pratiquement au même niveau. Toutes les classes d’âge sont concernées et plus particulièrement les classes d’âge sensibles. Le taux de chômage pour l’ensemble des deux sexes est situé selon le Rgph 2014 à 14,8% en moyenne. Mais celui du sexe féminin se situe très au-dessus de cette moyenne: 22,2% contre 11,4% pour les hommes.
Lors de la période 2010-premier trimestre 2016, le taux de chômage global est passé de 13% à 22,8%, celui du sexe féminin de 18,9% à 22,8%. Le taux de chômage des diplômées du supérieur lors de la période indiquée est passé de 32,9% à 39,8%, enregistrant un pic au premier trimestre 2012 (49,4%). Il se situe, en moyenne, au double du taux de chômage des diplômés hommes. L’amélioration toute relative du taux d’activité du sexe féminin ne peut pas expliquer de telles disparités entre sexes.
Taux de chômage global selon le genre 2006-T1/2016 en %
Taux de chômage des diplômés du supérieur selon le genre 2006-T1/2016 en %
On aurait tort cependant de croire que la réussite scolaire et universitaire des Tunisiennes puisse expliquer à elle seule l’aggravation du taux de chômage féminin et la persistance des écarts entre genres. En effet, le taux de chômage des femmes sans niveau d’instruction en 2014 est de 13,8% contre 8,6% pour les hommes. Le taux de chômage des femmes de niveau primaire est de 17,0% contre 9,1% pour les hommes. Quant au taux de chômage des femmes de niveau secondaire, il se situe en 2014 à 21,1% contre 13,4% pour les hommes.
Taux de chômage par sexe et niveau d’instruction en 2014 (effectifs en 1000)
PAO : population active occupée. PAT: population active totale
Si le taux de chômage féminin se maintient à son niveau actuel ou ne baisse pas suffisamment au cours des cinq prochaines années, les acquis féminins et féministes de plus d’un demi-siècle d’indépendance nationale finiront par être mis en danger. L’égalité des droits entre sexes n’aurait en effet pas beaucoup de sens si elle devait être délestée en cours de route de l’accès des femmes à l’emploi et à l’indépendance financière qu’il procure. Aussi, la question qui se pose avec gravité est de savoir si la Tunisie, donnée en exemple dans la zone quant à la place de la femme dans la société, est décidée ou non à garantir aux Tunisiennes l’intégralité de leurs droits. Autrement dit, la question qui se pose est de savoir quelle politique de développement suivre pour inverser des tendances qui n’ont que trop pénalisé la population active féminine, les femmes diplômées notamment.
(Lire l’intégralité de l’étude dans la dernière publication du Crédif).
HabibTouhami