Projet du code des eaux : Une consultation circonstanciée s’impose
«Plaidoyer de la société civile pour une révision de fond du projet du code des eaux», tel était l’intitulé du dossier de revendication des acteurs actifs dans le secteur de l’eau présenté au ministère de l’agriculture le 15 février 2016.
Soucieux des défis majeurs auxquels fait face la ressource hydrique en Tunisie, les acteurs de la société civile se mobilisent pour accomplir leur rôle de partenaire dans la formulation des politiques publiques dans le secteur.
Le projet de refonte du code des eaux a été lancé depuis 2009 dans l’intention d’adapter le cadre législatif en vigueur avec les exigences actuelles et futures. En mai 2015, le projet du code des eaux a été soumisà la consultation publique.
En décembre 2015, les associations : la recherche en action (REACT), Réseau associatif pour la nature et le développement en Tunisie (RANDET), Eau et Développement, l’association tunisienne Changement Climatique et du Développement Durable (2C2D), United Nations - Humain Rights, l’institut de la citoyenneté et leforum tunisien pour les droits économiques et sociaux(FTDES) ont organisé une journée d’étude sur le projet du code des eaux.
Cet atelier a été organisé dans le but d’analyser le nouveau projet de code des eaux et d’en sortir avec des propositions constructives et des recommandations perspicaces.
A la lumière des interprétions élaborés par les acteurs de la société civile, le ministère de l’agriculture a été appelé à réviser une foisde plus son projet de code des eaux.
La société civile a lancé un plaidoyer après des vains efforts consentis pour convaincre les autorités compétentes de refaire une deuxième consultation publique sur le projet du code. Cette lettre a été adressée officiellement au ministère de l’agriculture, au ministère de l’environnement et à la présidence du gouvernement. Ce plaidoyer a repris les grandes idées qui ont été discutées lors de l'atelier de décembre 2015.
D’après le plaidoyer, le projet de code des eaux conserve les mêmes démarches stratégiques de gestion, et ne résout pas l'épineux problème d’éparpillement des responsabilités entre les différents départements ministériels et institutionnels.Néanmoins, le pouvoir décisionnel est toujours en possession du ministre chargé de l’eau. Les autres composantes n’ont qu’un simple rôle consultatif. Un cadre qui fait abstraction aux« garanties pour l’équité et l’intégrité dans la gestion et le partage de la ressource».
La Tunisie post révolutionnaire opte pour une démarche participative en vue d’une gouvernance nouvelle fondée sur la transparence et la redevabilité et refuse de maintenir un schéma institutionnel caduc. Le projet du code des eaux ne conçoit pas les mécanismes de redevabilité pour garantir la transparence,l’objectivité et l’efficacité dans la gestion de l’eau.
En revanche, le projet du code des eaux reconnaisse le droit à l’eau et à l’assainissement, mais sans pour autant préciser les modalités de ce droit humain.
En sus, le projet de code des eaux ignore entièrement le concept de décentralisation territoriale de la gestion de l’eau qui était parmi les recommandations majeures.
La ressource hydrique subit une exploitation irrationnelle sans l’applicabilité des mesures de sanctions annoncées par la loi. Le nouveau projet de code des eaux a mis en considération des « mesures répressives en alourdissant les sanctions et les peines ». Cependant, la société civile prône pour « une démarche proactive dans laquelle les sanctions sont une composante de dernier recours ».
Par ailleurs, le projet de code des eaux n’aborde même pas le modèle de régulation « considérée comme la pièce angulaire pour une utilisation efficiente, équitable et durable de l’eau ».
Le 25 février 2016, le chef du gouvernement M. Habib Essid a présidé un conseil ministériel restreint consacré à l’examen du projet du code des eaux.
Aucune réponse officielle n’a été communiquée par rapport à la demande de la société civile.
Aujourd’hui,nous sommes face à une responsabilité collective qui doit être correctement assumée. La Tunisie est dans la catégorie des pays qui souffrent d’une pénurie structurelle d’eau. Les défis des impacts additionnels au réchauffement climatiques et ses indicateurs au rouge ne nous laissent pas de marge d’erreur dans la formulation de notre code des eaux.
Nour El Houda Chaabane