Opinions - 20.10.2015

A la foi des islamistes, opposons notre scepticisme ; à leur ferveur, notre sens de la mesure. Je suis la voix…

A la foi des islamistes, opposons notre scepticisme ; à leur ferveur, notre sens de la mesure. Je suis la voix…

Je suis la voix qui révèle que le marché du Hadj en Tunisie est une véritable machine à sous. Les bénéfices, qui en découlent, représentent une convoitise pour tous, donnant libre cours au trafic, au favoritisme et aux profits alléchants. Mais depuis janvier 2011 seules les allures ont changé, les esprits étant les mêmes, aussi ne faut-il pas se leurrer, même si les autorités de la place ont fait foi de préparatifs rigoureux dans le souci de réussir la saison dans de meilleures conditions que les précédentes. Mauvaise qualité de l’hébergement, indiquant qu’il arrive que 10 pèlerins se trouvent obligés de partager la même chambre. Le manque d’encadrement nécessaire, notamment après la bousculade de Mina, a obligé plusieurs pèlerins tunisiens, à ne pas terminer les rites du Hadj. Ce qui devait représenter pour beaucoup l’aboutissement spirituel suprême, le Hadj devait tourner au chemin de croix sur la route chaotique du business sans foi ni loi. Malheureusement, le pèlerinage fut jalonné de péripéties fâcheuses et éprouvantes, marqué par une forte mortalité et le désenchantement face aux belles promesses non tenues. On était loin de s’attendre à une telle pagaille et insalubrité. Le séjour des pèlerins n’a été qu’une suite de déconvenues. Les accompagnateurs fuyaient les personnes qui se plaignaient. Ils n’ont rien respecté de la tradition et ont démontré une rare incompétence. Jusqu’au bout l’organisation aura été déplorable. Les pèlerins se sont sentis piégés par une organisation peu scrupuleuse qui a abusé d’eux pour en tirer largement profit. Ils ont été traités comme des moutons, mais pas comme des clients, et encore moins comme des croyants lancés dans une quête spirituelle. Il est odieux de voir combien la religion est devenue un business sans état d’âme, sans égard pour les personnes les plus vulnérables et âgées sous le choc d’un pèlerinage gâché, dont on sait qu’elles ne porteront pas plainte, du fait de leur méconnaissance de leurs droits.

L’islam est différemment perçu par ceux qui le considèrent de l’intérieur ou de l’extérieur. Le rituel du Hadj comme pratique est souvent présentée de manière très caricaturale même par ceux qui y sont impliqués. On ajoute que sa pratique est vivement recommandée pour se laver des pêchés et se purifier l'âme. Est-ce pour autant une interdiction de vivre ? Le mois du hadj permettrait aux pratiquants de mettre leur piété à l'épreuve et de renforcer leur adhésion à la religion musulmane. En plus, il serait de bon aloi de lire la totalité du Coran soit au travers de récitations, soit au travers de lectures personnelles afin, dit-on, d’en comprendre le texte. Tous ces propos, ne cachent pas l'islamophobie interne et la crainte du ‘’qu’en dira-t-on’’ et de la censure sociale qui fait peser une Chappe de plomb sur les attitudes sortant du socialement convenable et du politiquement correct. L’Islam, n’a jamais été affaire d’imposer une pratique ou d’exacerber des tensions, simplement une pratique qui n’est souvent pas très bien connue même par ses pratiquants. Mais il faut bien comprendre que le vivre-ensemble c’est aussi pouvoir vivre librement avec ses convictions et même sans croyances ; et cela s’appelle la liberté de Conscience. Ce serait un grand progrès social que de faire fi des oppositions de principes, pour chercher à comprendre un tant soit peu l'autre, connaître sa manière d'appréhender le monde et de percevoir les choses, car au final, on peut avoir des religions différentes ou ne pas en avoir et néanmoins partager une assise culturelle commune et un ensemble de valeurs fondamentales. Tout est dans le dialogue et la communication. Camus dans "L'Etranger" disait que : "Tout refus de communiquer est une tentative de communication ; tout geste d'indifférence ou d'hostilité est appel déguisé".

Je suis la voix pour demander la création d’une "instance" pérenne de dialogue, une plateforme pour faire vibrer l’islam au rythme de la réconciliation avec la laïcité, la République et les autres religions. On a beaucoup écrit que les trois institutions étaient conciliables et qu’il s’agissait simplement de faire l’effort de porter sur les devants de la scène des personnes compétentes pour parler d’islam et de démocratie. Mais il nous manque le comment les identifier ? Les acteurs actuels qui se disent savants ou érudits ne reflètent en aucune façon et certainement pas la complexité du problème. L’Islam souffre de problèmes qui se situent à l’intérieur, mais d’abord d’une crise d’identité et de reconnaissance. Les problématiques que soulève l’Islam ne sont pas simples. D’abord parce qu’il n’existe pas un Islam mais "des Islams". Aussi, parce que ce que les uns diront, les autres auront tendance à le contredire et que les mouvements minoritaires seront toujours mis de côté.

Je suis la voix pour réagir contre la vision de ce que nous avons fait de l’héritage qui nous a été transmis par nos pères fondateurs : Un islam unique, épuré des travers des autres confessions monothéistes, selon ses voeux. En effet, il suffit du bon sens de la raison humaine pour reconnaître clairement à travers la tradition, qu’il n’a jamais approuvé ou béni les dogmes, les confessions, les rites ou les cérémonies et autres fioritures et mises en scènes qui se sont mises en place dans les différents islams pratiqués à travers le monde d’aujourd’hui. Il nous faut constater que le peuple de Mohamed, comme celui de Moïse avant lui, s’est corrompu lui-même à travers l’ambition dévorante de certains chefs de nations et chefs de guerre qui prennent l’Islam pour un cheval de bataille et commettent au nom du divin des actes qui n’ont aucune désignation dans la morale. La vérité leur étant inconnue ou leur faisant peur, elle est devenue mensonge ou est passée sous silence et le mensonge servant leurs intérêts matériels et leurs ambitions politiques, vérité. Des pseudo-savants religieux malhonnêtes et indignes de confiance corrompent en leur nom les gens simples, du peuple. Beaucoup de ceux-là se disent connaisseurs, faisant preuve alors de négligence ou proclamant pour vérités, des menteries éhontées. Ils nourrissent le faux et cachent sa vraie nature pour justifier des actes inhumains et barbares tout en profitant des ornements éphémères du monde. Ceci amène les adeptes aveugles et/ou vulnérables à donner crédit aux déclarations de ces imposteurs de religion et à commettre des actions qui leur coutent leur âme en même temps que leur corps et celui d’innocents.

Je suis la voix pour dénoncer la dégradation éthique et spirituelle du peuple musulman et par là son échec dans l’établissement d’une vraie Nation. Toutes les qualités de dévouement et les multiples mérites de la morale ne seraient d’aucun recours devant tant de ruine et de désolation. La force d’un dirigeant aussi grand soit-il reste fondamentalement dépendante de la conduite morale et spirituelle de son peuple. Voir les Islamistes de toutes sortes utiliser le message pour nuire aux hommes et peindre en noir l’avenir du monde comme ils l’ont fait de leur drapeau, est insupportable.

Je suis la voix qui refuse de voyager à la Mecque, pour remercier les prétendus représentants de l’Islam mondial, ainsi que les prétendus ulémas (savants et érudits) et muftis pour avoir si outrageusement tenu la position qui leur a été transmise par leurs prédécesseurs au cours des 1500 ou 2000 dernières années. Des rois tout puissants, iniques et avides de pouvoir qui imposent leurdiktat intellectuel et spirituel en éradiquant toute trace de liberté envers leurs peuples respectifs et les peuples alentours. Aspirant à gouverner en maîtres absolus, ils n’hésitent point à asseoir leur autorité sur la terreur et sacrifier leur propre nation sur l’autel de leur intérêt personnel et de l’ambition.

Je suis la voix pour affirmer qu’un grand ménage s’impose. Il faudrait d’abord demander la pénitence et le démantèlement de ces instances et aussi que soient corrigés certains passages dans la doctrine musulmane, en raison des inventions qui ont été ajoutées par les hommes et qui sont imputées au prophète pour manipuler les foules. Alors, déjà, avec cette proposition, nous serions vraisemblablement vu comme des ennemis de la prétendue ‘’vraie Foi’’ (celle posée par ces ‘’marchands du temple’’ de l’Islam politique et/ou guerrier comme vraie alors qu’elle n’est qu’une illusion mercantile officielle) et comme hérétiques. Car en effet, cette doctrine est dans sa base, selon les prédicateurs et diseurs de religion et autres fatwas, essentielle, infaillible et inaccessible aux corrections. Cette considération émanant principalement de l'enseignement islamique fondamentaliste, mais aussi du coeur de la doctrine de la Sunnah, selon laquelle, Dieu se serait exprimé dans le Coran de manière concluante et définitive.
Je suis la voix pour déplorer le fait que même en étant très prudent et diplomate, le conflit avec les grands rites et pratiques serait inévitable. Constatant le caractère anachronique de nombreux passages des interprétations officielles, de même que celui de la tradition qui en découle et des pratiques, il faudrait rouvrir la porte de l’ijtihad et rénover toutes les interprétations d’un autre Age, obsolètes. Aussi, s’ils étaient vraiment des rites et pratiques de «l’Islam», alors ils seraient contraints d’évoluer. Mais ils ne le feraient certainement pas, car les différents islams sont allés trop loin dans l’invention. Ils ont construit trop de choses séculières, qui sont en contradiction avec l’éthique de Mohamed prophète et de son Message : L'enseignement, la hiérarchie et la machinerie des fonctionnaires, les concordats et les traités, les coffres remplis et les nombreuses reliques, de grands recueils, la tradition, les empreintes caractéristiques, les chichis, les habits (les «manières» et les «contenances») des fonctionnaires, la rencontre mondiale des représentants et des jeunes et les jours cultuels. Nous sommes obligés de constater que l'Islam de notre XXIème siècle n’est pas l’islam, du moins pas celui qu’avaient eu pour mission de mettre en place nos pères fondateurs, une religion et une civilisation qui devait faire avancer et progresser l’humanité et non pas la plonger dans l’obscurantisme et le chaos. Autant de pratiques qui se sont écartées du chemin défini. Un islam qui a été dépravé et qui se sert, pour justifier l’existence de tous les bandits de religion, de tous les faux dévots et brigands revendiquant des Khalifats illusoires, du prétendu «mystère de Dieu» qu’ils détiendraient et de la foi de l'Homme, pour donner l’apparence de pouvoir négocier avec le ciel pour leurs fidèles en pratiquant leur prédication et les sacrements, en prononçant des jugements divins et des condamnations sauvages. (Voir le cas de Karl Andrée, un anglais de 74 ans, malade du cancer et asthmatique qui vient de passer deux mois dans les geôles d’Arabie Saoudite et qui doit subir dans les prochains jours une terrible flagellation de 350 coups de fouet pour avoir transporté dans sa voiture du vin.

Je suis la voix qui souhaite, au nom de tout ce qui est important, la fin de la puissance des pseudo-clergés, des prédicateurs et muftis et autres charlatans et mythomanes ayant l’Islam comme fonds de commerce. Il est temps de révéler les impostures. Cela dérangerait et attirerait forcément les foudres de ces ordres sabbatiques de l’Islam officiel, ces ‘’ sanhédrin’’ de l’Islam comme celles des islamistes de tout poil (salafistes et autres barbus belliqueux acculturés et régressionnistes, fous de guerre). Les seigneurs corrompus de l'islam, leurs acolytes et leurs aides ne se laisseraient pas si facilement abattre. Ils se battraient avec leurs griffes et leurs dents pour conserver leur pouvoir de domination et leurs privilèges, comme cela a toujours été depuis les dernières 2000 années. Il n’est de meilleur commerce et instrument de domination que la crédulité, la superstition et le fanatisme. Mais cela doit être fait pour être en accord avec notre conscience.

Je suis la voix qui, sans plus être prudente, se fâcherait et ôterait le masque du visage des prédicateurs, muftis et ayatollah, et autres tartuffes. Toutes ces institutions artificieuses et hypocrites, avec leurs insignes et habits, devraient être frappées d’anathème, comme ce fut le cas pour les seigneurs de la Mecque, les théologiens et les scribes d’autrefois.

Je suis la voix pour reconnaître qu’il n’est qu’une chose de réellement établie en Islams, c’est que le Coran est, dans son ensemble et dans le monde entier, incontestablement, «la base entière de l’islamité mondiale». Alors, les dogmes et les écrits de foi des différents théologiens, Ulémas et tenants des rites ne sont que les interprétations peut-être légitimes mais toujours circonstanciées du Coran. Il faudrait une seconde chance, une remise des pendules à l’Heure. Même si l’idée était adopté et devait être bien vu dans la population, en dépit de la calomnie ‘’cléricale’’, les instances officielles gardiennes de la religion ne l’accepteraient pas si facilement et la verraient comme perturbatrice et agitatrice, pour empêcher de croire en rond. Celles-ci disposent pour ce faire de beaucoup de voies et moyens dans les Etats. Aucun journal ou organe d’information ne publieraient ni ne diffuseraient ses annonces et préceptes. On justifierait une censure par la simple raison que cette idée n’est pas compatible avec les principes de société et est subversive. L'islam installé a ses gens partout qui parlent pour Dieu. Aussi, au lieu d’essayer d’«expliquer» aux gens les critiques adressées, chercheraient-ils, là où ils le jugeraient nécessaire, d'agir politiquement ou juridiquement contre avec tout l’arsenal répressif ou de les éliminer par la force et la violence. Et les politiciens pertinents et opportunistes se courberaient à nouveau et avec respect devant le pouvoir monolithique de la religion, comme se sont prosternés les hébreux devant le veau d’or. Comme le disait un dirigeant d’Etat, immédiatement après la fin de la 2e Guerre mondiale « la religion n’a pas besoin de se reconvertir ou de changer, la plupart trouvent certainement ceci comme un reflet d'éternité».

Pendant près de 2000 ans les dirigeants et les dominants du monde sont venus et sont partis dans une succession permanente. Mais la religion et ses gens restent là aux côtés des actuels ou des futurs dirigeants pour empêcher qu’un iota ne soit changé de ce qu’ils ont affirmé et imputé à Dieu. Et les nonces de l’Islam se laissent toujours offrir de nouvelles richesses, des privilèges et des avantages pour conforter la position des politiques. Ils craignent que, pour autant que le ciel se penche un peu plus sur la Terre qu’à l’accoutumé, les sièges et tabourets cléricaux et sacerdotaux, tout autant que politiques commencent à vaciller et qu’ils n’en tombent lourdement.

L'islam est devenu une institution puissante et monolithique, une des principales institutions théosophique de la Terre très commode pour défendre des ambitions politiques de domination. L'islam a une plateforme malléable, le Coran que l’on veut lire de diverses façons. Mais l'islam a aussi le dogme, et les prédicateurs et prêcheurs qui parlent de semaine en semaine avec admonestation et vindicte de la foi. Et l'islam a ses muftis pour déguiser le bien ou le mal et en estomper les contours. Son message traverse instamment avec force les murs de tous les palais de la terre et aussi les dernières cabanes à la lisière de la civilisation. Et les gens de toutes couleurs l’exultent quand ils retournent en ces lieux encore et encore. Aucune somme d’argent n’est de trop pour le gardien et sa cour. Cet homme qui leur donne espoir. Il leur est un modèle. Et il leur donne la force, y compris les ulémas. Et bien sûr, l'islam prend aussi Mohamed dans sa garde. Mais il le présente comme un prophète sans visage, désincarné, muet, une allégorie. Cela doit suffire!

Je suis la voix des victimes de la main du fanatisme terroriste qui comptent sur nous pour rétablir la vérité. De même que Dieu n’a que nos mains pour prodiguer sa charité, nos bouches pour proclamer le message, nos pieds pour le porter sur tous les continents, de même l’honneur de l’Islam est commis à notre jugement, à notre courage aussi. Tous ceux qui prônent la violence, le crime de masse, la terreur, le massacre d’innocents et autres inhumanités au nom d’un Dieu, ne sont que des imposteurs qui commettent une usurpation de fonction et manifestent un manque de confiance envers lui. Ils offrent une piètre image de l’Islam et du musulman nombriliste, renfermé et sauvage paranoïaque et névrosé. Il refuse la communication et tire avant de parler. Il est largement temps de rétablir la vérité au sujet de l’Islam et de l’histoire. Nous devons la protéger et la répandre comme une promesse de lendemains meilleurs, ouverts sur la tolérance, la liberté le progrès et la modernité, et non en faire un réduit identitaire immonde et hermétique replié sur lui-même.


Monji Ben Raies
Universitaire
Enseignant et chercheur en droit public
Université de Tunis-El-Manar
Faculté de droit et des sciences politiques de Tunis