L’avenir nous appartient
C’est désormais un réflexe pavlovien présent chez beaucoup de nos compatriotes. À chaque attaque terroriste, bon nombre de tunisiens se mettent à pleurer Ben Ali, à dire «qu’il revienne, qu’ils nous débarrasse de ces monstres qui veulent anéantir la Tunisie » ;«il n’y a que lui, qui avec ses méthodes, peut nous en débarrasser »; «Vous allez voir, ce n’est que le début, vous finirez par le regrettez et vous n’aurez que vos yeux pour pleurer ». Et oui ! Après chaque acte terroriste, la même rengaine. Il suffit de jeter un coup d’œil sur le Mur des Lamentations tunisien, Facebook, pour le vérifier. Comme si notre destin était de vivre ou bien sous un régime autoritaire où une poignée de parvenus affamés s’en mettent plein les poches. Ou bien, vivre ad vitam æternam dans un climat délétère, sous une menace permanente du terrorisme et se résoudre à subir les attentats.
Je ne suis pas en train de jouer les héros de la vingt-cinquième heure, loin de là. De toutes les manières, ça sera perdu d’avance vu que c’est la spécialité des populistes notoires de l’ancienne Constituante qui demeurent les champions de l’insulte de l’ancien président et de son régime. Ils croient que plus ils l’insultent, plus ils sont patriotes.
Toutefois, je n’accepte pas de choisir entre la peste et le choléra. Ni un régime liberticide, autoritaire où le «tbourib» – loi du plus fort – est le mot d’ordre ni une Tunisie faible qui capitule face à l’extrémisme islamiste. Il existe une troisième voie, celle de se battre vaille que vaille pour aboutir à une Tunisie prospère où l’État retrouve son éclat et ne sera plus en déliquescence. Où la République incarnera l’autorité et la souveraineté nationale tout en respectant la suprématie de la loi. Naïveté, crieront certains. Pas du tout, c’est une question de volonté. Tout réside dans cette volonté.
Et avant tout, il faut que nous comptions sur nous-mêmes avant de compter sur nos partenaires, étatiques ou institutionnels soient-ils. La France, l’Allemagne, l’Union européenne, entre autres, peuvent nous prêter main-forte mais il faut tout d’abord prendre notre destin en main. Nous sommes en guerre contre le terrorisme. Et qui dit guerre, dit économie de guerre. Par conséquent, les grèves interminables et injustifiées -provenant du corporatisme égoïste et dangereux qui sévit depuis des mois – doivent cesser. Ces dernières déconcentrent l’État et ses institutions dans la lutte contre le terrorisme. De plus, et c’est connu par toutes et tous, à moindre de vouloir se voiler la face, la conjoncture économique actuelle et l’état déplorable de nos finances publiques ne permettent plus de financer d’éventuelles augmentations salariales.
Je ne vais pas dans le présent article faire un diagnostic de la situation économique du pays, je l’ai déjà fait dans un précédent article intitulé «Une Tunisie en stagfaltion», également paru dans Ledears. Il faudrait ajouter que le carnage de Sousse a atteint un des principaux poumons économiques de la Tunisie, le tourisme, tout un secteur se retrouve donc sinistré et agonisant.
Le constat est affligeant, la Tunisie vit l’une des pires crises économiques de son Histoire Contemporaine, il ne faut donc plus l’affaiblir en lui demandant de donner ce qu’elle n’a pas. Ça ne fera qu’affaiblir l’État et l’handicaper davantage dans sa guerre contre le terrorisme.
Toutes nos institutions, et surtout l’institution sécuritaire, présentent des failles et doivent être réformées. Toutefois, les moyens humains et logistiques font défaut et nous sommes frontaliers de l’un des pays les plus instables de la planète. Il faut donc inciter à réformer, proposer des réformes et essayer d’influer dans ce sens mais il ne faut surtout pas se lancer dans un concours de dénigrement contre l’État et ses institutions, ceci ne fera que concrétiser l’un des objectifs des terroristes qui est de rompre toute confiance entre les Tunisiens et leur État.
Ils est donc nécessaire de garder foi en l’avenir, de ne pas désespérer et surtout de se comporter en citoyens responsables capables de faire des concessions matérielles et de reprendre sérieusement le chemin du travail. Dans le cas contraire, la descente aux enfers se poursuivra, nous irons de mal en pis et le terrorisme ne sera pas vaincu.
Faisons le bon choix, il n’est certes pas facile mais il portera ses fruits . Montrons que la troisième voie est possible, que la Tunisie peut prospérer loin de la dictature et loin de l’extrémisme islamiste. La balle est dans notre camp et l’avenir nous appartient.
Chedly Mamoghli