BARGOU : La lente résurrection
L’inauguration d’une nouvelle unité d’exploitation et de conditionnement d’eau de source naturelle à Jebel Bargou a fourni l’opportunité de renouer le contact avec des parcelles de la région de Siliana – au nord-ouest tunisien – n’y ayant pas mis les pieds depuis l’an 2000.
Subjugué à l’époque par la beauté du double site naturel et archéologique, je n’ai pas focalisé sur les aspects -pourtant visibles-de l’extrême dénuement de la population locale. J’admets que leur sens altier de la fierté et de la réserve imposait le silence respectueux. IL était indécent alors de questionner des gens humbles sur leur condition alors qu’ils portaient des visages éclatants de vigueur et d’optimisme. Une richesse (intérieure) dans la pauvreté (extérieure). Peut être.
Mais cette fois, la boule fut submergée par tant d’interrogations en relevant le frappant paradoxe entre les plaines ondulantes et pleines de cultures céréalières, les richesses hydriques et l’état piteux dans lequel se trouve – à titre d’exemple -l’infrastructure dans le continuum de patelins de Sodka-Dkhila- Ain boussadia-Sidi M’tir- Al Hdadia et Drija …Je présume que ces dénominations parlent davantage à une carte d’etat major qu’à la majorité de compatriotes déconnectés et dont le pays trans-réel se glane -désormais - sur l’écran tactile que sur la glèbe concrète.
En effet, l’unique étroit et sinueux sentier relève du parcours du combattant. Les patelins se dépeuplent. La vue d’une présence humaine remplit soudain l’âme d’aise et de mélancolie .D’aise car que seraient ces espaces silencieux et verdoyants sans une telle présence ?.. . Et de mélancolie, tant la beauté du site renvoie à l’asymétrie de la misère ambiante .Ironie du contraste. Pour faire diversion, l’esprit actionne l’imagination. Evasion réaliste. Traverser cette contrée à la végétation luxuriante remémore de lointains souvenirs de la Toscane-au centre de l’Italie- des régions des Balkans et plus loin les plaines du far ouest des Etats unis.
Flash back: Deux siècles avant l’enfant Jésus, cette région berbéro- numide marquait les annales de ses empreintes. Avec son Maitre Massinissa le premier pan africaniste puisque qu’on lui prête la célèbre assertion :«l’Afrique au Africains « en passant par le roi Syphax qui aurait été trahi par le pré cité Maitre. Motif: rivalité sentimentale dont l’enjeu n’était autre que la belle Sophonisbe ... Bouleversement géostratégique aussi : Rome ,grâce à son allié de traitre peut ainsi mettre sous sa coupe la Numidie; quitte à livrer au sort tragique la nièce de Hannibal. Lequel sera battu -plus tard- à la bataille de Zama par Scipion (dit l’africain par usurpation).
Mais la bravoure de Massinissa et la longévité de son œuvre seront reconnues par ses vainqueurs. Elle dépassera les frontières. La Grèce - dont il manie la langue -lui dresse -à Délos- un mémorial et Jugurtha, son petit fils ,se moque de la grandeur factice de la ville éternelle. Avant qu’il ne soit victime d’une autre trahison des siens .Il y creva enchaîné. Assoiffé et affamé.
Cette terre de Siliana perméable à l’érosion prend au coucher du soleil une couleur ocre. Pourrait –on oublier les corps à corps sanglants dont elle fut le champ pour repousser les envahisseurs …
Et les Balkans et la Toscane dans tout ça!
Avec la même topographie -et moins que ça - dans ces régions occidentales ont émergé des installations merveilleuses: téléphériques - gites - chalets –stations thermales... Içi -en comparaison -presque rien. «Wallou »Quelle déception.!
Des cases de fortune et des coupe rigoles datant d’avant de la 2 eme guerre mondiale font office de maigres vestiges d’installation. Des troupeaux se faufilent à travers la flore odoriférante, au bonheur des abeilles.
A une centaine kilomètres de Tunis, les pendules du temps semblent s’immobiliser. Un âne broute tranquillement; tandis que quelques jeunes sont attablés sobrement sur la terrasse du café Hazem. En face un bureau de poste mal badigeonné. Un écolier -sortit de nulle part- charrie un cartable bourré..
Sous la hauteur pyramidale écrasante, des vieillards se souviennent d’une autre bataille livrée en 1954 contre un bataillon de l’armée coloniale française. Pourquoi? On l’ignore - Mais ils ont néanmoins contraints l’envahisseur à battre en retrait…L’honneur est sauf.
Et le FarWest américain
C ‘est grâce à des échantillons de semences recueillis dans cette région nord africaine que les States sont devenus un important producteur de sorgho dans le monde. L’autre blé hivernal; ils l’obtiendront des plaines de Russie. Ironie de l’histoire: l’Afrique du nord qui fut des années durant le grenier de l’empire romain est devenue –de nos jours –importatrice de céréales. Incapable d’assurer la sécurité alimentaire de sa population …
Bientôt –pas étonnant que la Chine occupe également le premier rang de producteur mondial d’huile d’olive grâce à plus d’un million de pieds d’oliviers fournis par la Tunisie contre un prêt bonifié ayant servi –dans les années 80- à édifier un centre culturel dans un quartier de la nouvelle bourgeoise citadinisée ne se reconnaissant plus dans ses origines paysannes du Krib- Aroussia ou de Rouhia -pour rester dans la fascinante région de Siliana.
A Djebal al Guitoun ,on passe à côté d’une ancienne unité de conditionnement d’eau minérale. Porte close. En cessation de paiement depuis 2009; elle est placée dit –on sous règlement judiciaire. Pour la nouvelle unité ultra-moderne de Bargou: Porte ouverte.Un bel exemple de la volonté entrepreneuriale.
Habib Ofakhri
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Mr. "l´assertion de Massinissa ne pourrait signifier ni les africains ni l´Afrique du 21 éme siècle. Il ya plusieurs interpretation; en effet´ d´habitude on construit des noms a´partir de la langue qu´on a: la langue latine. En effet il y a rapprochement entre "africanae" fraction ou friction ou encore fracture. Dans le recit latin-Romain- de ces évènements il est question de "fracture" c´est á dire Carthage était patie de Rome mais séparé par la mer Mediterranné, puis il est question de designer par là un port qui lie Rome á Carthage. Rien n´est sûr mais encore c´est moins sûr que se soit l´Afrique dont on parle ici. Les portugais auraient donné ce nom á l´Afrique parce que ils en ont entendu parler. Il y eu plus qu´un hazard?
C´est trés probable que le terme "Africa" vienne du mot "Aprica" qui veut dire "ensoleillé" en latin ou d´un autre mot latin aussi "africus" qui signifie "un vent pluvieux qui vient de Carthage. Notre probleme est bien nous vivions des évènements determinants pour notre existence, nous continuons á chercher des solutions comme si nous vivions dans la paix eternelle. Nous n´avons pas appris á forger un "ennemi", un Caton ne pourrait ètre qu´un politicien Romain amusant et non ennemi dangereux. Avons-nous eu des ennemis dans l´histoire? nous n´avons eu que des "brassages". Mais les Romains étaient du debut jusqu´á la fin des ennemis de Carthage. Pourquoi ils se derangeraient pour chercher un nom pour le pays dans son histoire; d´ailleurs se sont eux, les Romains, qui les premiers ont utilisé le terme Afrique ou africanus et l´ont fait connaitre au monde et non les Carthaginois ou les arabes. Cette question, trouver l´ennemi, est pour moi une question essentielle.