News - 14.04.2015

Je suis inquiet pour ma Tunisie

Je suis inquiet

Je suis inquiet sur le sort de mon pays. Je souhaite être le seul à l'être. Loin de moi l’idée d’incriminer les personnalités, qui à tous les niveaux, ont la charge de diriger mon pays. je le vois. Elles se démènent, elles travaillent, elles contactent le peuple, elles parlent, elles décident…mais je ne vois pas cette lueur d’espoir qui me tranquillise sur le devenir de mon pays, lorsque je vois chaque problème abordé. J’ai l’impression qu’il n’y a pas de capitaine à bord et donc pas de ligne et de cadres directeurs qui me permettent de savoir que nous sommes sur le bon chemin. Je ne perçois pas la main de fer dans le gant de velours dont le pays a cruellement besoin. J’ai l’impression qu’on ne sait pas où nous allons. J’ai l’impression que le diagnostic n’a pas encore été fait. J’ai l’impression que les mesures qu’on prend ici ou là ne répondent pas aux véritables besoins et qu’on ne distingue pas bien l’urgent du moins urgent car tout urge. Peut-être que le Plan de développement qu’on concocte nous permettra de voir plus clair et nous servira de fil d’Ariane pour sortir du tunnel sans grands dommages.

J’impute ce malaise notamment au choix du régime politique que la «troika» a imposé au pays sous le couvert d’une légitimité politique acquise par les urnes. Je crie haut et fort que notre pays n’est pas mûr pour un régime parlementaire et qu’il fallait reconduire le régime présidentiel moyennant l’instauration de garde-fous. C’est trop tard?
Je crois qu’avec un Président fort, bien des décisions auraient pu être prises sans trop de palabres. Le pays a besoin beaucoup plus d’actions que de délibérations à n’en plus finir. Plus on discute et plus la situation devient inextricable.

Les exemples abondent. je ne citerai, par exemple, que celui des problèmes du bassin minier par lequel il fallait commencer vu son urgence. Avons-nous encore besoin de plus de plus d’un mois pour tenter d’esquisser des solutions? Les gouvernements précédents n’avaient-ils pas étudié la question? L’avaient-ils mal étudiée? Avaient-ils opté pour des solutions inappropriées?
Aujourd’hui, croit-on résoudre les problèmes de production et d’exportation en créant deux nouveaux postes de responsables sur place, qui viendront alourdir, outre mesure, les charges de la CPG sans que leur action puisse ouvrir de nouveaux horizons pour la CPG, le bassin minier et le pays? je ne le pense pas.

Il fallait commencer par convoquer les éléments sur place qui ne font que jeter l’huile sur le feu pour des raisons, je crois, politiques et les mettre devant leur responsabilité. Il faut qu’ils soient amenés à demander, d’abord, aux ouvriers de reprendre leur travail. Un gouvernement ne doit pas discuter sous la menace des mouvements de foule devenus légion dans ce pays.
L’Etat conviendra avec les salariés qui ont repris le travail que la CPG sera auditée sur le plan social, administratif, financier et technique sans que cette opération ne doive s’éterniser et que s’il  y aurait des responsabilités avérées, des sanctions immédiates seront immédiatement prises.

L’audit dégagera des propositions d’aménagement au niveau de la gestion à tous les niveaux (équipements à renouveler, limitation du personnel, encadrement, problèmes liés au transport du phosphate par chemin de fer…).

Au nombre des propositions devra figurer, en bonne place, l’ouverture du capital de la société aux salariés sous forme d’avances sur les recettes à produire. Une fois la CPG, sans sureffectif,sera en mesure de produire, de vendre et d’exporter une partie importante des bénéfices, devra servir à développer la région du bassin minier. L’Etat devra s’y engager.
Lorsqu’on a une entreprise qui est proche de la faillite et qui perd quotidiennement de l’argent faute de production, l’Etat n’a rien à perdre en faisant participer les salariés à la gestion de la CPG et en consacrant  une grande partie de ses revenus à la région qui a tant souffert. Ces revenus serviront à  l’amélioration de l’environnement sanitaire, la construction et l’équipement d’un hôpital, l’alimentation de la région en eau et le développement de l’agriculture là où on pourrait le faire.
Qui refuserait-il ce deal? A-t-on besoin d’un génie pour faire cela ? le temps urge et cette bombe à retardement risque d’éclater car il y a certainement des pêcheurs en eau trouble et d’amateur de populisme politique qui peuvent presser sur le bouton.

Tunis, le 14 avril 2015
Mokhtar el khlifi