News - 30.07.2014
Pauvreté : 15,5% des Tunisiens ne perçoivent que 12% des subventions
La vérité des indicateurs statistiques est édifiante : 15,5 % de la population tunisienne se trouvait, en 2011, en dessous de la ligne de pauvreté mais ne perçoit que 12 % de l’enveloppe totale des subventions accordées par l’Etat. En effet, le Tunisien défini comme pauvre ne perçoit individuellement que 64,8 dinars par an, alors que le Tunisien riche, quant à lui, perçoit 86,9 dinars par an. C’est ce que révèle une étude que publie la Banque africaine de développement (BAD), intitulée « Subventions alimentaires et aides sociales directes, vers un meilleur ciblage de la pauvreté monétaire et des privations en Tunisie ». Objectif : formuler des solutions qui optimisent les transferts directs et les procédures de transferts sociaux.
Quelle est en fait la performance des systèmes de transferts sociaux existants en Tunisie. Une première analyse de l’impact des subventions alimentaires et des transferts sociaux directs vers la population pauvre et vulnérable avait souligné que le caractère universel des subventions alimentaires nuit gravement à l’efficience de ce mécanisme de lutte contre les inégalités et la pauvreté.
D’où la pertinence de cette nouvelle étude de la BAD. Reposant sur des méthodologies éprouvées et reconnus au plan international, à l’instar de la méthode des privations multiples et de celle des “Proxy mean test”, elle s’inspire de ce qui a pu se faire en Iran, en Inde et au Maroc, tout en tenant compte des spécificités de la Tunisie.
Et les solutions existent. Pour peu qu’elles soient appliquées, on peut épargner à l’Etat tunisien des millions de dinars de dépenses qui grèvent son budget, tout en réduisant fortement la pauvreté dans le pays.
Le rapport définit une nouvelle méthode de ciblage pour identifier les ménages tunisiens les plus démunis. In fine, l’efficience du Programme national d’aides aux familles nécessiteuses (PNAFN) s’en verrait améliorée, pour un moindre coût. L’étude esquisse divers scénarios, permettant de conjuguer plusieurs objectifs, dont la réduction de la pauvreté, la préservation du pouvoir d’achat de la classe moyenne et l’allègement du poids de ces transferts sur le budget de l’Etat. Elle conclue que :
- Sans jamais toucher aux subventions alimentaires, recourir à cette approche pour les transferts directs permet de plafonner le taux de pauvreté extrême à 1,5 % (contre 4,6 % actuellement), avec un budget pour le PNAFN réduit de moitié.
- Dans le cas où le budget du PNAFN demeure inchangé, la pauvreté extrême est éradiquée et le taux de pauvreté abaissé à 8 % (contre 15,5 % en 2011). Les ménages souffrant d’extrême pauvreté percevraient alors 2 526 dinars par an – tous transferts confondus –, soit 2 277 dinars de plus qu’aujourd’hui. In fine, les Tunisiens les plus pauvres toucheraient 52 % du budget total alloué aux transferts directs et indirects (contre 12 % aujourd’hui).
- Accroître la force de frappe budgétaire du PNAF, en lui transférant l’intégralité du budget dévolu jusqu’ici aux subventions, et en utilisant les nouvelles méthodes de ciblage, entraînerait des résultats spectaculaires : la pauvreté extrême en Tunisie serait éradiquée (avec un taux de 0 %) et le taux de pauvreté réduit à 4,1 %.
Les scénarios de politiques ainsi esquissés, qui explorent différentes combinaisons d’allocation et de réduction budgétaire, soulignent tous, sans exception, que rien ne milite en faveur du maintien des subventions indirectes, si l’objectif premier est de lutter contre la pauvreté. Aucun scénario de politique publique n’égale, en termes de performance, l’abolition des subventions et la réallocation du budget dévolu aux transferts directs.
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