News - 26.10.2009

Mohamed Nouri Jouini à Leaders : nos atouts pour transformer l'économie tunisienne

Au terme d’une campagne électorale et d’un scrutin qualifiés « d’exemplaires en tous points, par les observateurs internationaux, soulignant sérénité, transparence et absence de dépassements », le Président Ben Ali a été brillamment réélu pour un nouveau mandat présidentiel avec 89.62% des suffrages. Sans attendre l’investiture du Président de la République et le démarrage de la nouvelle législature, le gouvernement s’est d’ores et déjà attelé à la mise en œuvre du programme 2009-2014, porté par la formidable adhésion populaire qui a marqué cette consultation.

Dès ce lundi après-midi, un conseil interministériel devait identifier les projets à inscrire au « Budget Economique 2010». Pour M. Mohamed Nouri Jouini, ministre du Développement et de la Coopération Internationale, « il s’agit maintenant de déterminer les priorités pour 2010, d’annualiser les progressions et d’aller dans le détail d’exécution. »

Dans une interview accordée lundi matin à Leaders, le ministre pose la problématique en ces termes : « Comment allons-nous réaliser les 425 000 emplois à créer ? Comment parviendrons-nous à porter le revenu annuel par tête d’habitant à 7000 D ? Et comment garantirons-nous la croissance indispensable ? »

« Le mérite de ce programme, affirme d’emblée, M. Jouini, c’est qu’il est clair, sincère avec le peuple, transparent, direct et courageux. Le Président Ben Ali n’a occulté aucune difficulté et a évoqué tous les défis qui sont en fait le résultat naturel du développement de la Tunisie. C’est le cas, en premier lieu de l’emploi, et plus particulièrement celui des jeunes diplômés. »

« On ne parle plus de pauvreté, de quartiers populaires, mais de nouvelles préoccupations, nées précisément du progrès enregistrés. Ne l’oublions pas, dans les années 80, le nombre total des étudiants n’était que de 30 000 environ. Il n’y avait alors que 10 à 11% des jeunes qui accédaient à l’université et 90% qui n’y parvenaient guère. Evidemment, cet écrémage pouvait garantir une « certaine qualité », mais excluait les masses. Je ne saurais accepter l’argument fallacieux selon lequel le quantitatif pénalise le qualitatif. L’ouverture de la voie du savoir pour tous, c’est le retour à une situation normale, naturelle. Parmi ces larges effectifs qui fréquentent, aujourd’hui, l’Université, il y a une grande masse moyenne, mais aussi beaucoup d’excellence. D’ailleurs en chiffres absolus, les excellents sont légion.»

« Constamment, nous devons veiller à l’amélioration de la qualité de l’éducation, de la formation et de l’enseignement supérieur. Cette qualité dépend de plusieurs facteurs dont le nombre et la compétence des enseignants et formateurs, les programmes et autres. Aujourd’hui, nous comptons près de 400 000 étudiants. La moitié d’entre eux ou presque ne posent pas de problème d’emploi. Les autres ont des difficultés d’intégration dans la vie active. Il faut le dire, le déficit structurel de l’économie tunisienne retient toute notre préoccupation. La réalisation de l’objectif de créer d’ici 2014, 425 000 emplois dont 60 000 à 70 000 d’emplois nouveaux pour les diplômés exige une transformation structurelle de notre économie. Aujourd’hui, l’industrie manufacturière génère 20 à 30% d’emplois de jeunes diplômés et il va falloir tout en soutenant ce secteur, encourager d’autres. »

« Il s’agit de réaliser cette transformation, par un meilleur ciblage des incitations, une fiscalité plus appropriée et surtout en renforçant le contenu technologique, l’innovation et la meilleure organisation en s'appropriant les sciences et technologies, le management efficient. »

La concurrence, moteur essentiel de la croissance

« Il faut commencer par l’industrie comme source de croissance. Ensuite, promouvoir le commerce et les échanges extérieurs. Mais l’ultime levier est sans nul doute le renforcement de la productivité et de la compétitivité. C’est là la synthèse de l’effort d’optimisation des ressources, d’intégration de l’innovation, de compression des coûts et d’introduction de la technologie et de la science à tous les niveaux, dans tous les secteurs. »

« A elle seule, l’économie n’est pas l’objectif unique. Elle est le levier du progrès intégral auquel nous aspirons. »

« La concurrence est devenue un moteur essentiel de croissance et de prospérité. Avec la libéralisation, nos industries manufacturières ont réalisé l’ampleur des défis auxquels elles doivent faire face et ont dû se redéployer pour accroître leur compétitivité. Aujourd’hui, l’écart avec l’Europe n’est plus que de 25% seulement dans ces industries, contre 40%, 50% et même 60% dans d’autres secteurs. Lorsqu’on sait que la productivité contribue à 50% de la croissance, on comprend l’importance de ce levier. »

« La poursuite de la libéralisation du commerce extérieur, c’est aussi la libéralisation du capital. Nous devons faire émerger de nouveaux secteurs, comme dans les services où l’innovation et le contenu intellectuel ne sont pas sans risque pour les investisseurs et ne peuvent se contenter de financements classiques. Il s’agit de mettre à la disposition du marché tunisien des instruments et produits financiers à même de répondre aux besoins notamment ceux des PME, avec l’aide de grands pôles économiques nationaux. C’est là, le sens de la vision du Président Ben Ali qui appelle à l’émergence de grands pôles privés, à même de jouer pleinement leur rôle dans le développement du pays.

Favoriser l’émergence de grands pôles privés tunisiens

« Aujourd’hui, les grands groupes ont une fonction très importante pour stimuler l’ensemble du tissu entrepreneurial, et se mettre en réseau avec l’ensemble de l’appareil productif. A ces groupes incombe la conception et le leadership, mais aussi l’animation du marché, l’encouragement des PME et la création de la valeur. »

« L’investissement direct étranger exige un grand marché, pour pouvoir y écouler la production, et, à défaut, un tissu de PME capables de satisfaire la demande. Or, la taille actuelle de nos PME ne saurait y répondre. Aujourd’hui, 90% des entreprises emploient moins de 10 personnes. Elles ne sont que 7% à employer entre 10 et 50 salariés et 3% seulement, y compris les entreprises publiques, à employer plus de 50 personnes. »

Malgré la crise, la Tunisie garde son attractivité


« Les effets de la crise sont encore là. Mais nous voyons poindre des signes positifs tout comme la reprise annoncée aux Etats-Unis et dans des pays européens. La Tunisie demeure une destination bien attractive pour les IDE. Les réalisations sont significatives. De 1.5 milliard de dinars en 2004-2005, nous avons atteint 3.4 milliards de dinars en 2008. Sans souffrir de désinvestissement, nous clôturons l’année 2009 avec des réalisations effectives de 2.4 milliards de dinars et ferons autant sinon plus (2.5 milliards de dinars) en 2010. A titre comparatif, nous n’étions qu’à 0.2 milliard de dinars au début des années 1990 et 0.6 milliard de dinars, au début des années 2000. »

« La crise économique et financière a impacté les IDE, tout comme particulièrement la baisse du prix du pétrole dont sont tributaires nombre d’investissements en Tunisie en matière d’exploration et de production. Mais, les signes de relance sont perceptibles. »

« Ce qui est significatif, c’est que les IDE dans les industries manufacturières ont enregistré une augmentation remarquable de plus de 10%, une tendance qui devra se confirmer à 15% l’année prochaine. »

Investissement national : les préalables

« Le grand stimulateur de l’investissement national, c’est sans nul doute le développement du marché, tant tunisien qu’à l’étranger. Cela ne peut se faire sans une grande compétitivité en termes d’innovation, de qualité, de design et de coûts, sans oublier le marketing. Il ne faudrait plus attendre l’arrivée des commandes, à travers des réseaux de donneurs d’ordre, mais aller directement à la rencontre de la demande et la satisfaire, en s’appuyant sur un réseau commercial dynamique et une approche nouvelle. Dans cet effort, les ressources humaines, l’organisation de l’entreprise et son management sont autant de facteurs déterminants. Tout comme le renforcement des fonds propres afin d’éviter que l’entreprise ne soit sous-capitalisée. »

« D’un autre côté, la convertibilité du dinar, d’ici fin 2014, devra impacter directement le compte capital de l’entreprise pour lui permettre de réaliser pleinement son intégration horizontale. Au lieu de se concentrer uniquement sur une intégration verticale, elle gagne à mettre en synergie ses différents métiers et potentialités et se déployer en expansion, à l’extérieur des frontières. Cela sera bénéfique pour l’exportation, l’emploi, et l’ancrage international. »

« Quant au rôle de l’Administration, il consiste à offrir les meilleures conditions possibles à l’investissement en introduisant encore plus de souplesse et de fluidité, en allégeant la pression fiscale par des incitations ciblées mais aussi une meilleure répartition et en consolidant un climat favorable et encourageant. »

« Aujourd’hui, le partenariat public-privé est déterminant et nous avons vu comment dans nombre de domaines, le secteur privé a pris de l’avance. Les ministères sont devenus les départements de tout un secteur et non la tutelle des entreprises publiques seulement. C’est le cas du ministère de l’Industrie qui n’est plus le ministère des entreprises publiques ou semi-publiques mais celui de toutes les entreprises dont la majorité est d’ailleurs privée. Celui du transport, comme d’autres domaines s’élargissent au-delà de la tutelle sur le secteur public, à l’ensemble des acteurs et entreprises. Et c’est là une évolution significative. »

Miser sur l’intelligence, l’innovation et la productivité

En conclusion, quel est le message du  ministre Jouini aux opérateurs économiques: « Mon message, c’est celui que vient d’adresser le Président Ben Ali à la Nation, aux chefs d’entreprises, comme à nos partenaires étrangers. La Tunisie s’emploie à offrir de bonnes conditions de travail, d’investissement et d’installation. Réduire les procédures, lever les entraves, libéraliser les activités et les échanges et encourager les initiatives : aucun effort n’est épargné. Il faut également accroître la confiance dans l’économie en renforçant les fondamentaux, consolider la paix sociale et miser sur l’intelligence, le savoir et la technologie. Un pays qui rompt totalement avec la pauvreté, s’investit dans le savoir et l’innovation, optimise l’utilisation de ses ressources, renforce le revenu des ménages, offre la chance de l’éducation, à tout un chacun, fait de l’emploi sa priorité, cultive la solidarité et érige l’effort en unique critère du mérite : la Tunisie est un pays qui œuvre de toutes ses énergies pour se hisser parmi les pays avancés. Le grand message, c’est une invitation à l’investissement. L’investissement direct étranger, l’investissement national, l’investissement personnel pour le progrès. »