Lettre ouverte à Si Youssef Essedik et à nos penseurs
La situation que nous vivons pourrait résulter grandement du vide culturel que le pays a vécu depuis des années.Le Pouvoir préoccupé par le développement économique et social n’a pas cru opportun de prêter l’attention nécessaire au développement, sur des bases saines, de la culture et particulièrement de la culture religieuse.
Notre civilisation essentiellement arabo musulmane dans ses aspects notamment historique et religieux a été quasiment occultée dans les écoles et les médias ce qui a poussé notre jeunesse à se ressourcer, ailleurs, soit auprès de civilisations ayant le vent en poupe, soit auprès de voix venues du Golfe nous « réislamiser » à leur façon. L’excision des femmes en est l’une des illustrations.
N’est-ce pas vrai que bien des familles « musulmanes » dressent leurs sapins de Noël et parlent constamment à leurs enfants dans une langue étrangère. Ainsi, bien de nos enfants abandonnent la religion initiale de leurs parents pour fréquenter les églises chrétiennes ou orthodoxes. L’occident avec ses réussites scientifiques et technologiques et son argent, les attire nécessairement. Ce sont ces jeunes-là qui ne se sont pas fait inscrire sur les listes électorales et n’ont donc pas voté en faveur du maintien de notre modèle social.
L’autre partie de notre jeunesse à l’écoute des chaines satellitaires et de leurs tentacules sur le terrain, a opté pour le reniement de notre modèle social. Par réaction et instinct de défense, elle a choisi de se faire pousser la barbe, de mettre une jelaba, et des savates et de s’arroger le droit de « réislamiser » les autres, par le prêche ou même par la violence et d’accepter même d’aller mourir en Syrie. Détachés de la vie d’ici-bas et attendant avec impatience la vie de l’au-delà, autrement meilleure, ils habillent leurs femmes, leurs filles et leurs sœurs de noir de la tête aux pieds alors que Dieu nous a appelé à croquer la vie à pleine dents sans oublier nos devoirs religieux.
Au nom d’une conception erronée de la liberté que d’erreurs faisons-nous les uns et les autres ! Je suis sidéré par l’attitude de nos politiques qui défendent la coexistence de ces deux modes de comportements antinomiques et portant les germes d’une violence future et de l’éclatement de notre société !
Qu’on s’ouvre sur les autres et qu’on s’enrichisse, cela est incontestable,mais que nous occultons notre propre civilisation, notre riche histoire et notre religion, c’est une erreur dont nous payons actuellement politiquement le prix.
Comment réparer les dégâts ?
J’ai entendu Monsieur Youssef Essedik, regretter que le débat, combien nécessaire à mon avis, qu’il a eu avec un certain Béchir Ben hassen, formé en Arabie Saoudite,ait été un dialogue de sourds et appeler la famille tunisienne, sur la chaine Ettounissia, ce Dimanche 17 mars (EmissionkalemEnness ) à prendre garde face aux graves dérives auxquelles s’exposent actuellement la jeunesse. Mais est-ce suffisant cher philosophe ?
Voilà un de nos penseurs qui ne ménage pas ses efforts, malgré son âge, pour nous éclairer, toutes les fois qu’on lui donne l'occasion de s’exprimer.
Rappelez-vous ce qu’il a enduré à Kelibia ! Parler dans un micro entre quatre murs vides !Il a même été interdit de parler.
Nous entendons parfois, si Mohamed Talbi,à qui on refuse de créer l’association qu’il se propose de créer.
Nous écoutons certains de nos penseurs dans les émissions de Nessma « Maghribouna… » et lisons sur « Leaders » certains articles, très intéressants, de Si Abdelwahab Meddeb.
Nos penseurs ont certes, publié leurs œuvres, mais des œuvres auxquelles n’accèdent pas le commun des mortels vu leur technicité.
Que faire alors ?
Je reviens à une idée qui me tient à cœur, celle du lancement d’une chaine satellitaire offrant un vaste espace libre à nos penseurs pour s’exprimer et débattre contradictoirement, dans un langage accessible au public, de questions de civilisation arabo musulmane, d’ histoire et d’Islam à l’effet d’éclairer objectivement le peuple sur la réalité et donc sur les dérives qu’il encourt.
Il ne faut surtout pas compter ni sur le Ministère des affaires religieuses , ni sur celui de l’Education Nationale pour faire ce travail. On doit s’attendre au contraire à ce qu'ils persévèrent sur la voie de l’obscurantisme.
C’est donc une question d’hommes et d’argent, de bonne volonté et d’organisation. Nous avons peu de temps devant nous, vraiment très peu, et il va falloir prendre le taureau par les cornes et s’engager immédiatement et résolument sur cette voie surtout que nous apprenons que plus d’une chaine satellitaire, à connotation « islamiste », a vu le jour, en un laps de temps record !
Si les Youssef Essedik, Jait, Taalbi, Meddeb, Charfi et autres se réunissaient enfin au sein d’un comité et lançaient ce projet, ils trouveraient, à coup sûr, les fonds nécessaires tant auprès de leurs compatriotes, d’ici ou d’ailleurs, et même auprès de pays maghrébins et européens (pourvu que la chaine gardera toute son indépendance).
Les partis politiques et la société civile devront appuyer ce projet.
Tous voudront bien trouver, à la base, un rempart contre le péril obscurantiste wahabiste rampant autrement plus efficace que les mesures sécuritaires.
La stabilité politique et le développement économique de notre pays dépendront, à mon humble avis, du lancement, le plus vite possible, de cette chaine et de sa réussite.
Je souhaite que cet appel soit enfin lu et entendu par les intéressés et ceux qui sont disposés à prêter leurs concours financiers et techniques à ce comité.
Mokhtar El Khlifi