Cheikh Kamel Djaït : Son dernier acte était d'offrir sa bibliothèque
L’avait-il pressenti! Quelques semaines seulement avant sa disparition le 22 décembre dernier, à l’âge de 90 ans, cheikh Kameleddine Djaït avait fait don à la Bibliothèque Nationale (BN) de l’ensemble de sa bibliothèque, un fonds documentaire bien précieux, hérité de plusieurs générations.
Un geste significatif qui consacre une vie vouée au savoir et au partage. Cheikh Kameleddine Djaït, né en 1922, ancien Moudaress à la Grande Mosquée et à la Faculté Ezzitouna de théologie et des sciences religieuses et ancien Mufti de la République (1998 - 2008), avait longtemps incarné les nobles valeurs héritées de ses aïeux.
Son grand-père paternel Youssef Djaït (né en 1830 à Tunis et décédé en 1915) fut notamment ministre de la plume puis Premier ministre de 1908 à 1915. Quant à son père, Cheikh El Islam Mohamed Aziz Djaït (1886 - 1970), il fut Cheikh El Islam malékite en 1945 et en même temps ministre de la Justice de 1947 à 1950. Il a été premier Mufti de la République de 1957 à 1962 et l’auteur bien connu du projet de la célèbre Majallah (dite Majallat Cheikh Djaït) ancêtre du Code du statut personnel de 1956.
En faisant don de sa bibliothèque si riche, et exprimant le vœu qu’elle porte le nom «Fonds Cheikh Kameleddine Ben Mohamed Aziz Ben Youssef Djaït», il avait voulu accomplir un devoir de transmission aux futures générations. Les chercheurs tunisiens et étrangers y trouveront des trésors en manuscrits et livres imprimés rares ainsi que de plusieurs autres documents, revues, journaux, etc.
«C’est un acte hautement remarquable, commente pour Leaders le professeur Mohamed Kamel Gaha, directeur général de la Bibliothèque Nationale, ravi de cette acquisition. Nos équipes s’emploient actuellement au traitement de ces documents par des spécialistes et nous espérons pouvoir les mettre le plus tôt possible à la disposition des chercheurs et du public».
Le professeur Gaha s’est rendu au mois d’octobre dernier auprès du vénérable Cheikh dans sa demeure de La Marsa et a mis tout de suite une équipe de spécialistes au travail pour inventorier les livres et documents disponibles et veiller au transfert des livres en toute sécurité de la résidence du Cheikh à La Marsa au siège de la BN à Tunis.
«C’est tout un travail minutieux qui commence, nous explique-t-il. Il y a d’abord l’inventaire détaillé, l’examen de chaque document pour vérifier son état et s’assurer s’il a besoin ou non d’un traitement spécifique de restauration ou chimique de protection, puis l’indexation et l’hébergement dans nos magasins. Mais, c’est une véritable mine d’or».