Success Story - 16.10.2008

Nadia Zeghal Marrakchi

Comment transformer une petite unité industrielle d’emballage flexible implantée à Sidi Salah (15km de Sfax) en un groupe maghrébin leader, avec 3 autres unités industrielles en Algérie, au Maroc et en France ? Un groupe qui atteint capital de 30 millions de dollars et un chiffre d’affaires de 66 millions de dinars.

Tous trois sont nourris d’une longue tradition patriotique et méritante avec pour grands-parents Si Sadok Guermazi (pharmacien, membre de la Constituante et ancien Maire de Sfax) et Si Taieb Zeghal, premier responsable de l’Hygiène et Santé de la région, dès l’Indépendance. Matheux émérite, le père, Si Hédi avait commencé par l’enseignement, de professeur à proviseur jusqu’à en devenir Secrétaire d’Etat, puis Ministre de la Jeunesse et des Sports, avant de lancer son entreprise. Au fil de longues années de labeur, s’est dessinée cette trajectoire qui se réalise aujourd’hui. Slim, Ingénieur Centralien puis formé aux Etats-Unis, avait fait ses premières armes chez Havas et Vivendi en s’intéressant de près au marketing et à la communication, avant de s’investir, à partir de Tunis, dans l’unité de la capitale et l’expansion internationale, nous y reviendrons. Lilia a fait des études à Paris Dauphine, elle a  travaillé chez Danone France avec une expérience en Tunisie dans le  consulting en logistique et informatique (ERP, WORKFLOW) ; elle s’occupe actuellement du système d’information du groupe. Nadia, elle, tient le siège et l’usine à Sfax où en 16 ans elle a gravi tous les échelons jusqu’à la Direction Générale. Véritable saga personnelle, mais aussi success story d’un groupe en plein élan.

Le grand mérite de Si Hédi Zeghal est d’avoir sur rallier ses trois enfants Slim, Lilia et Nadia à ce projet/ambition.

Après de brillantes études dans de grandes écoles françaises prépa, Ecole Nationale des Statistiques, ENSAE puis IAE, Institut d’Administration d’Entreprise, et un séjour de 6 mois aux Etats-Unis, vous choisissez, en 1992, de rentrer à Sfax, et rejoindre l’entreprise familiale, Cogitel, en tant que stagiaire SIVP. Pourquoi ce choix ?

C’est vrai que ma formation de base ne me prédestinait pas à être dans le domaine de l’emballage, les diplômés de l’ENSAE sont plus orientés dans le service comme les banques, les assurances, les bureaux conseils… Mais à travers mes stages chez Danone France, ensuite chez Alsthom (Sibille-Dalle à l’époque, fabricant de papiers techniques), j’ai découvert le domaine de l’emballage, en tant que client pour le premier et fournisseur pour le second. C’est un domaine passionnant, où se rencontrent différents spécialistes pour suivre l’évolution des habitudes de consommation, répondre aux différentes normes et exigences internationales, s’adapter aux différentes cultures, prolonger la durée de vie des produits et les faire voyager toujours plus loin...

A la fin de mes études, une opportunité s’est présentée pour moi, un poste dans le domaine de l’emballage flexible en Tunisie à COGITEL. L’entreprise était jeune, beaucoup d’emballages étaient importés d’Europe : un vrai challenge dans un domaine qui me plaisait et qui me plait toujours.

Et c’est parti pour 16 ans ! Ce n’est pas monotone et trop durer dans une même entreprise ?

Monotone ? Je n’ai jamais eu cette impression. A vrai dire, il y a chaque année du nouveau dans mon activité, dans Cogitel et aujourd’hui dans Altéa Packaging.

En rejoignant Cogitel, j’ai commencé par la planification, l’analyse de la production et des achats, la gestion du réseau informatique et l’amélioration de l’exploitation de l’ERP existant. Ce poste, de part sa définition, m’a permis de travailler avec les différents départements de l’entreprise. Ensuite je me suis occupée aussi de la mise ne place du système qualité avec l’arrivée du programme ISO 9000 en Tunisie. Cogitel a été certifiée depuis 1998. J’ai également géré le premier dossier de mise à niveau. En même temps j’ai travaillé sur les devis commerciaux et participé à l’établissement de la stratégie commerciale et la coordination de l’équipe commerciale. J’ai occupé également le poste de responsable achat. Plus tard j’ai été nommée directeur général adjoint auprès de notre Président Directeur Général en l’occurrence mon père qui m’a permis de me former dans le domaine et m’a soutenue tout au long de mon parcours.

Au cours de cette période, J’ai vécu l’évolution de Cogitel marquée par des changements importants : de 1994 jusqu’à 1999, il y a eu une augmentation de la capacité de production avec l’acquisition de plusieurs machines et un changement au niveau des procédures avec la mise en place du système qualité et l’obtention du certificat ISO9001. De 2000 à 2004, il ya eu plusieurs grands projets concernant différents domaines, comme la gestion des encres avec l’acquisition d’une station de mélange automatique, l’amélioration de l’organisation et de la gestion de la maintenance qui a été informatisée. En 2005, l’arrivée de mon frère à COGITEL a changé complètement la stratégie : COGITEL est entrée dans une nouvelle ère, pour passer d’une entreprise locale à un groupe international, Altéa Packaging. La nouvelle vision est de devenir leader au Maghreb et du Moyen Orient et un outsider crédible en Europe. Il y a eu tout d’abord, l’acquisition de la SIED à Tunis, ensuite celle de Roland Emballages en France, celle d’Optima au Maroc et la création de Cogitela en Algérie. La capacité de Cogitel a été augmentée avec l’acquisition de nouvelles machines.

J’ai également vécu l’évolution du marché tunisien, qui nous a amené à faire plusieurs développements de produits et de services au fil des années. Les marchés à l’export, nous ont permis d’améliorer notre maitrise de la logistique vers plusieurs pays. Aujourd’hui nous travaillons également sur le projet hygiène conformément à la norme ISO 22000.

C’est dur pour une jeune femme de réussir en tant que chef d’entreprise ?

A mon arrivée à COGITEL en 1992, le milieu de l’emballage était plus l’apanage des hommes même en Europe, je m’étais très souvent retrouvée la seule femme dans le groupe, réellement cela ne m’a pas posé de problème. Je ne pense pas non plus qu’être femme chef d’entreprise puisse être dur, actuellement les femmes occupent des postes de responsabilités au même titre que les hommes. Il faut oublier et faire oublier cette « différence homme/femme» et se comporter comme un responsable. Personnellement, je n’ai pas rencontré de difficultés particulières.

Quels ont été pour vous les facteurs de réussite ?

  • L’ambition et la volonté de réussir
  • Le travail et la rigueur
  • L’encadrement de mon supérieur hiérarchique en l’occurrence mon père et l’aide de mes collègues et collaborateurs
  • La communication et la bonne relation avec tout le personnel
  • Mon parcours d’études surtout en classes préparatoires et la vie à l’étranger depuis mon bac m’ont appris à être plus autonome, à m’adapter rapidement aux changements et m’ont préparée à affronter des situations parfois difficiles…..

Vous avez dû surmonter plus d’une difficulté. Quels sont les pièges que vous avez pu désamorcer et les difficultés vaincues ?

La première difficulté, était de m’immiscer dans un département technique fort et de demander des explications ou des changements alors que j’étais considérée comme un gestionnaire débutant et pour certains des plus âgés, une femme qui ne comprend rien à la technique. On est arrivé à changer plusieurs choses.

La deuxième, c’était avec l’avancement de l’informatisation. Nous avons bien avancé. Aujourd’hui c’est ma sœur qui a repris le flambeau avec plus de difficultés puisqu’il s’agit de gérer tous les sites du groupe.

Ensuite la mise en place du système qualité, ce n’était pas le concept en lui-même qui dérangeait mais le passage de la tradition orale à la tradition écrite, la difficulté était aussi bien interne qu’externe avec des clients et des fournisseurs. Il fallait persévérer et convaincre.

Si c’était à refaire, reprendriez-vous la même voie ?

Sans hésiter, oui.

Pousserez-vous votre fille à suivre vos pas ?

Je n’ai pas de fille, j’ai 2 fils qui sont très sensibles à l’emballage, ils me ramènent les échantillons (après la consommation bien sûr !). J’aimerais bien que l’un d’entre eux suive le même parcours, mais ça sera à eux de choisir.

Si j’avais une fille, je serais contente qu’elle suive mes pas.

Quelles sont, d’après vous, les clefs de la réussite pour un chef d’entreprise ?

  • L’ambition
  • La créativité et la capacité d’anticiper
  • La productivité et la capacité de s’adapter
  • Les compétences et la capacité d’apprentissage
  • L’intuition et la prise de risque
  • La communication, le relationnel et la capacité de convaincre

Bio Express

  • Adresse e-mail : nadia.zeghal@cogitel.com.tn
  • Année de Naissance : 1967
  • Etudes : Classes préparatoires aux Grandes Ecoles, Ecole Nationale de Statistique et D’Economie (ENSAE),
    DESS à l’Institut d’Administration d’Entreprise (IAE)
  • Année d’entrée dans la vie active : 1992
  • Principales fonctions occupées : Responsable planification et informatique, Responsable Qualité, Responsable Achat, directeur Général Adjoint
  • Position actuelle : Directeur Général
  • Positions internationales : Coordination du commercial et de l’achat du groupe (missions)
  • Jardin Secret (Loisirs, passions…) : Décoration et jardinage, tennis, musées et monuments.

Altea Packaging en bref

  • Domaine d’activité : Emballages Flexibles
  • Date de constitution : 2006
  • Capital : 30 millions de US dollars
  • Chiffre d’affaires : 66 millions de dinars (2007)
  • Résultat net : nc
  • Unités industrielles : 5
  • Effectifs : 400
  • Taux d’encadrement : > 20%