Caïd Essebsi, sur les traces de Bourguiba, Diori et Senghor, pour donner à la Francophonie une autre dimension
En décidant de conduire lui-même la délégation tunisienne au Sommet de la Francophonie (Erevan Arménie, 11-12 octobre 2018), le président Béji Caïd Essebsi a sans doute voulu donner un nouveau souffle à l’œuvre des pères fondateurs de cette « communauté de destin et de solidarité ». Fondée le 20 mars 1970 à Niamey (Niger), par les présidents Habib Bourguiba, Hamani Diori et Leopold Sedar Senghor, ainsi que et du Prince Norodom Sihanouk (Cambodge), elle portait alors le nom de l’Agence de Coopération Culturelle et Technique (ACCT).
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La francophonie n'est plus ce qu'elle était : un organisme regroupant les pays ayant le français en partage. Elle est devenue un instrument diplomatique entre les mains de Paris. Cette tendance relevée à la naissance de l'organisation n'a cessé de s'affirmer depuis. Avec Emmanuel Macron, elle est avérée. Non seulement beaucoup de pays n'y ont pas leur place, où le français ne pèse pas lourd dans les programmes scolaires et qui ne pratiquent la langue de Molière qu'épisodiquement, comme les musulmans de circonstance la prière : "salate el guiyed jemâa oua aâyed", selon l'adage tunisien. Mais on apprend en outre que le président Macron soutient avec force la candidature de la ministre d'un pays de l'est africain totalement anglophone et que parmi les candidats à venir figure l'Arabie Saoudite, dont seuls quelques princes connaissent des rudiments de français qu'ils utilisent habituellement à des fins qui n'ont rien de culturel. Dans l'intervalle, on a perdu en route l'ardente obligation de la démocratie, exigence initiale d'adhésion. Faites le tour des adhérents actuels, le nombre de pays affichant des valeurs démocratiques se compte les doigts d'une seule main. Celui qui trop embrasse mal étreint. On comprend que la France en perte de vitesse sur tous les plans, attaquée sur son propre terrain par l'anglais, dans un monde qui lui échappe de plus en plus, se raccroche aux branches, mais on comprend mal que la Tunisie continue à suivre passivement sans se poser les questions indispensables sur son insertion dans son environnement arabe, et international, en adoptant résolument l'anglais comme première langue étrangère et en se projetant dans le siècle au lieu de regarder fixement dans un rétroviseur embué. Car la francophonie de Léopold Sedar Senghor, Aimé Césaire, Houphouët Boigny et Habib Bourguiba a été enterrée depuis longtemps sous les décombres d'un monde qu'il serait vain de chercher à ressusciter, à l'heure du business, du marketing, de l'informatique et du marché.