Une visite protocolaire de routine ou une réelle opportunité d’impulsion? Tunis et Rabat accordent un vif intérêt à la visite que doit entreprendre au Maroc le chef du gouvernement Youssef Chahed, à partir de ce dimanche après-midi. A l’invitation de son homologue, Saad-Eddine Al-Othmani, ils co-présideront lundi 19 juin la 19ème session de la grande commission mixte. Au menu, la signature de pas moins de 13 conventions relatives notamment à l’Investissement, l’aviation civile, la formation professionnelle et l’emploi, l’enseignement supérieur agricole, les instituts de pêche, les programmes exécutifs en matière de jeunesse et des affaires religieuses, la défense du consommateur et la métrologie.
Sera-t-il reçu par Mohamed VI?
Mais, au-delà de ces questions qualifiées de techniques, ce grand rendez-vous 19-19 (19 juin et 19ème session) est avant tout politique à plus d’un titre. Mais Avec ce qui se passe aujourd’hui dans les pays du Golfe au sujet du Qatar, en Libye avec l’avancée du général Haftar, et pour ce qui est des risques sécuritaires et du terrorisme, la dimension politique de cette visite est essentielle.
Outre ses entretiens avec son homologue marocain, Youssef Chahed rencontrera les présidents des deux Chambres, à savoir, Habib Malki, président de la Chambre des Représentants (USFP, élu en janvier dernier) et Hakim Benchamass, président de la Chambre des Conseillers (PAM, élu en octobre 2015). Aucune indication n’a pu être obtenue par Leaders quant à savoir si une audience avec Sa Majesté le roi Mohamed VI est prévue au programme. Cette rencontre, si l’agenda le permet, viendra alors une apothéose. Ca sera un signal fort pour dynamiser la coopération bilatérale et intensifier la concertation entre les deux pays sur des questions cruciales d’intérêt commun.
Youssef Chahed sera accompagné lors de cette visite par quatre membres du gouvernement. Il s’agit des ministres du Transport, Anis Ghedira, et de l’Emploi et de la Formation professionnelle, Imed Hammi, et des secrétaires d’Etat aux Affaires étrangères, Sabri Bach-Tobji et du Commerce, Abdellatif Hmam. La délégation officielle comprend également les conseillers diplomatique et en communication du chef du Gouvernement, à savoir respectivement l’ambassadeur Tarek Ben Salem et Mofdi Mseddi. S’agissant d’une grande commission réunie au niveau des chefs de gouvernement, la session sera précédée par une réunion au niveau des hauts fonctionnaires, présidée du côté tunisien par l’ambassadeur Mohamed Samir Koubaa, et d’une préparatoire ministérielle en présence de Sabri Bach Tobji.
Un 19 - 19 très politique
Les deux chefs de gouvernements sont nouveaux en poste: Youssef Chahed, entré en fonction le 26 août dernier est à son 9ème mois à la Kasbah alors que Saad-Eddine Al-Othmani, nommé en mars de cette année n’affiche au compteur que trois mois effectifs. Tous deux auront alors l’occasion de se rencontrer pour la première fois et de se connaître réciproquement pour pouvoir travailler ensemble, ce qui est important.
Outre cette chimie relationnelle pour réactiver tant de dossiers et de commissions mixtes, le contexte géopolitique dans la région et les défis communs rendent la concertation entre Tunis et Rabat.
Au premier chapitre figure la crise dans les pays du Golfe, focalisée sur le Qatar. Le Maroc qui s’est situé à égale distances entre les parties prenantes, est à ce sujet sur la même longueur d’onde que la Tunisie. Plus, son initiative de médiation, ne peut que recueillir notre appui.
Sur la Libye, les approches sont convergentes. Le Maroc entend donner un nouveau souffle à l’accord de Skhirat moyennant quelques mises-à-jour et la Tunisie pousse de son côté son initiative lancée avec l’Algérie et l’Egypte, ce qui s’inscrit dans le même sens.
Le sujet le plus brûlant reste cependant celui de la sécurité avec la persistance des menaces terroristes. Le partage d’expériences, les échanges de renseignements et d’autres formes de coopération en la matière s’avèrent impératifs.
El Kamour et Al Houceima
Un autre sujet, même s'il n'est pas évoqué nommément sera sans doute en toile fond lors des entretiens Chahed - Al Othmani: comment faire face à la contestation sociale? La Tunisie a son El Kamour, et le Maroc, son Al Houceima. Y a-t-il ici et là des enseignements tirés par les dirigeants d’un pays qui peuvent être utile à ceux de l’autre? Chacun est preneur.
L’essentiel est que cette visite puisse imprimer une grande relance politique, économique et culturelle, notamment, entre la Tunisie et le Maroc. Ce que Tunisiens et Marocains, particulièrement les jeunes, réclament avec insistance.
Taoufik Habaieb
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